EURYDICE, UNE EXPÉRIENCE DU NOIR

 

Théâtre de l’Athénée Louis-Jouvet
7 Rue Boudreau
75009 Paris
01 53 05 19 19

Jusqu’au 15 avril 2022, à 20h

 

loupe Photo © Xavier Lambours

 

Le spectacle commence doucement, à pas feutrés, dans une obscurité qui devient pénombre. On pourrait se croire chez Claude Régy. Une forme féminine se détache progressivement. Des sonorités diverses, aussi : industrielles, aquatiques, organiques ou minérales, qui créent une atmosphère pesante, une ambiance lourde qui semble venir des profondeurs. Mais où sommes-nous exactement ? Dans l’intérieur d’un appartement ? Dans la rue d’une ville abandonnée ? Dans l’exploration des méandres d’une âme ? En enfer ? Ce court opéra brouille les repères, sacrifie la narration à la traversée sensorielle et joue du mystère pour poser des questions au spectateur sans apporter de réponses. Il ne faut pas s’attendre à reconnaître le personnage mythologique d’Eurydice qui soliloque pendant que celui qu’on suppose être Orphée (Dominique Mercy) se déshabille puis se rhabille, torturé dans son mutisme, comme un fantôme errant. Les deux personnages, enfermés dans leur solitude, ne se rencontrent pas mais renvoient l’un à l’autre, comme s’ils occupaient deux dimensions disjointes de la réalité. À la voix de soprano de Jeanne Crousaud, tantôt lyrique, tantôt tremblante, se mêlent des échos de son propre chant préenregistré et des bribes de sons grâce à l’usage d’un logiciel et d’électronique : ça se disloque, ça sonne, ça siffle, ça déchire, ça grésille, ça grince – à moins qu’il ne s’agisse du bruit des fauteuils de quelques spectateurs qui, perdus, quittent la salle. Il faut dire que la musique tourmentée et bruitiste du compositeur russe Dmitri Kourliandski (qui s’inspire notamment de celle d’Helmut Lachenmann) ne plaira pas à tout le monde. Trop lointaine, cette Eurydice m’aura personnellement rendu dubitatif.

Frédéric Manzini

 

Eurydice, une expérience du noir

Musique : Dimitri Kourliandski sur un poème de Nastya Rodionova (chanté en français)
Mise en scène : Antoine Gindt
Piano : Bianca Chillemi
Chef du chant : Thierry Fiévet
Collaboration à la mise en scène : Elodie Brémaud
Scénographie : Élise Capdenat
Lumières : Daniel Levy
Costumes : Fanny Brouste

Avec : Dominique Mercy (Orphée), Jeanne Crousaud (Eurydice)