Entête

COMBAT DE NÈGRE ET DE CHIENS

 

Théâtre de la Bastille
76 rue de la Roquette
75011 Paris
01 43 57 42 14

Jusqu’au 23 novembre à 20h
et du 24 novembre au 2 décembre 2022 à 20h30.
Relâche les dimanches.

loupe

 

 

 Écrite en 1979, la pièce de Koltès déjà maintes fois représentées, a vu le jour sur scène en 1983. De l'avis même de l'auteur, ce n'est pas la colonisation ni l'Afrique qui l'intéresse.

Mais alors, quoi ?

Il semblerait que Koltès poursuive ici ses interrogations sur l'être humain, ses doutes, ses bassesses et ses cruautés. La vision d'un chantier en Afrique, avec ses gardes armés, ce microcosme où s'affrontent des passions plus ou moins avouables serait à la source de la pièce. Mais Koltès insiste sur le fait que le contraste était frappant : quant aux relations entre les personnages, les relations femme-homme, elles pourrraient se situer à Paris, dans le XVIème.

Soit donc un chef de  chantier, Horn : il a vécu, connu pas mal de choses et grimpé un à un les échelons; C'est un homme en bout de course, qui n'aspire, alors qu'il vient de se marier, qu'à quitter le chantier pour se retirer en France. Cal est d'une autre trempe : agressif, violent, il se méfie des Noirs, les craint, même. Un crachat (et les crachats auront leur importance dans la pièce) lui fait perdre ses nerfs : il tue un journalier noir, cache son corps, le déterre, l'enfouit ailleurs.  Mais un "frère" vient réclamer le corps. Les belles paroles de Horn, le whisky, l'argent même, n'y feront rien : il veut le corps pour l'ensevelir dignement. On pense à Électre.

D'ailleurs on pense à beaucoup de choses en voyant ce "Combat de nègres et de chiens". À une tragédie antique, par exemple. À du Claudel, peut-être, où les passions amoureuses ou le simple désir, sont sublimés par les mots de Koltès. Son verbe.

Il faut lui reconnaître une force de conviction, une maîtrise de ses personnages et des phases de l'action. Mais il y a quelques longueurs et Koltès peut se laisser prendre à la griserie des mots, il charge. De même, des entrées et sorties de personnages, parfois dictées par la nécessité dramatique, peinent à convaincre.

Il n'en reste pas moins que ce trio d'hommes tous plus ou moins charmés par LA femme est prenant; d'autant qu'il s'y mêle un conflit ouvert de civilisations et d'influences : qui règne, qui dirige ? Qui a simplement le pouvoir, celui de dire oui ou non, de décider de la vie et de la mort des autres ? Est-ce que je connais l'autre, est-ce que je fais l'effort de le  comprendre, est-ce que je l'écoute, même ?

Le décor montrre des baraques de chantier et du sable, des projecteurs, un arbre aux fleurs colorées, sans préjuger de l'importance de l'ailleurs, le dégagement vers le public qui entoure ici la scène. Mise en scène brillante : elle porte et les comédiens sont tous tendus, dans l'énergie... sans temps morts.

Une mention spéciale à Denis Mpunga, tout en réserve et à Chloé Chevalier qui joue Léone, égarée dès le début dans un monde et une situation qui la dépassent.

Gérard Noël

 

Combat de nègre et de chiens

De Bernard-Marie Koltès.
Création collective
Mise en scène : Mathieu Boisliveau
Collaboration artistique : Thibault Perrenoud et Guillaume Motte
Assistant à la mise en scène : Guillaume Motte
Dramaturgie : Clément Camar-Mercier

Avec : Chloé Chevalier, Pierre-Stefan Montagnier, Denis Mpunga et Thibault Perrenoud

Scénographie : Christian Tirole
Lumière : Claire Gondrexon
Costumes : Laure Mahéo
Régie générale et son : Raphaël Barani
Pyrotechnie : Claire Gondrexon et Raphaël Barani
Régie plateau : Benjamin Dupuis
Régie Bastille : Erwann Petit