Entête

LE JOUR OÙ JE SUIS DEVENUE CHANTEUSE BLACK

 

Théâtre des Lucioles
10, rue du rempart St-Lazare
84000 - Avignon

à 19h15

Relâches : 12, 19, 26 juillet

 

Le Jour où je suis devenue chanteuse black loupe 

 

Une véritable évasion, une heure vingt de pur bonheur

 

La voix off de la petite ch’ti Caroline emplit l’espace sombre de la scène lorsqu’elle s’adresse à son grand-père. Il s’appelait Claude Odell Dabbs (28 déc. 1920 - 1er juin 2012 à Dallas, un des seuls à avoir cru en elle et en son talent, et comme il a bien fait !

 C’est l’histoire improbable et pourtant authentique d’une petite fille à la recherche de ses racines après avoir découvert un secret familial. Elle apprend qu’elle a un grand-père noir qui vit au Texas où elle et sa mère vont se rendre. Une autre vie les attend, une famille remplie de cousins, de cousines, de chants et de danses. Cette petite fille n’aura plus qu’un seul rêve ! Faire plaisir à son grand-père pour devenir la nouvelle Diana Ross.

La petite fille a grandi, et Caroline Devismes arrive sur scène en pleine lumière en chantant. Elle est de dos et la voix exceptionnelle qui s’élève laisse le public perplexe, est-ce une bande-son que l’on entend ?

Elle se retourne et c’est bien elle qui chante, elle est grande, blanche de peau, belle, blonde aux yeux bleus, rien ne laisse entrevoir ses origines, hormis sa chevelure et surtout sa voix ! Elle nous livre avec sensibilité et drôlerie, son long parcours pour arriver à devenir chanteuse black. Tout en gardant une diction irréprochable, elle raconte, se raconte, nous raconte et tout cela en dansant sur un rythme endiablé. Tout s’enchaîne et se maintient, régulièrement soutenu par les deux musiciens, l’un  au clavier, l’autre à la batterie. Elle va nous enchanter et irradier la scène en reprenant les grandes voix black, Diana Ross, Donna Summer, Stevie Wonder en passant par la pop, la soul et bien sûr la danse, les paillettes, et va nous faire entrer dans  les coulisses des Folies Bergère.

On les écoute, on les regarde et on les admire. La voix de Caroline fascine, la musique captive, tous trois nous transportent dans un univers artistique qui repousse un peu plus les frontières du dicible. On se laisse happer par la véracité de l’étrange histoire de Caroline et la magie de ses mots, la magie de sa voix, et de sa grâce lumineuse, fluide et exquise. Un spectacle ou parfois se mêle un voile de douce mélancolie qui enveloppe le tout, comme l’émergence d’une âme en proie à des fêlures anciennes.

La mise en scène de Thomas Le Douarec est rigoureuse et énergique. Elle s’attache par son rythme, son mouvement, la qualité vocale exceptionnelle, à la notion de plaisir du spectateur. Une mise en scène qui se joue d’humour et d’espièglerie laissant une plage de liberté entre les trois comédiens qui leur permet une belle complicité.

Cette pièce menée tambour battant par les trois comédiens/chanteurs/musiciens chevronnés, est un vrai moment de plaisir tant elle est riche, entraînant le public tantôt par le rire, tantôt à travers l’émotion.

On pourrait parler de spectacle/cabaret, de comédie musicale, mais on sent chez Caroline Devismes, une carrure de comédienne et elle n’a peur de rien, son tour de chant est préparé, enveloppé dans une grande feuille théâtrale. Elle danse, chante et joue avec un maintien d’une grande précision mais avec beaucoup de naturel, on a une femme qui manie tout et qui le manie très bien.

Les spectateurs de tous âges ne peuvent qu’être séduits, ravis même par ce trio et leurs performances musicales mais aussi scéniques, à la virtuosité non dépourvue, tant s’en faut, d’humour, et de fantaisie. Un spectacle qui ne va pas manquer d’attirer un large public ! Un grand bravo !

Fanny Inesta

 

Se lancer dans une pièce musicale sur les traces d’un grand-père noir inspirant pour devenir chanteuse noire dans la lignée de Diana Ross, Donna Summer et Gloria Gaynor quand on est une grande blonde du nord est une vraie gageure qui appartient au domaine des rêves. Pourtant un jour une petite fille découvre que son grand-père est un noir texan et à partir de ce jour elle n’a qu’une idée devenir chanteuse noire.

On va suivre cette recherche dans les méandres des music-halls.

On assiste à cette volonté au départ impossible où une fille du nord, bien blonde montée sur des jambes interminables va chercher le succès dans tous les recoins où l’on chante pour y placer du blues.

Alors elle sera meneuse de revue aux Folies Bergère, ira aux États-Unis à la recherche de ce grand-père, de cette filiation. La grande blonde aux yeux bleus est une noire... qui peut croire, comment imaginer cela.

De chanson en chanson, elle se fraie un passage vers une désir à priori impossible, fini les barrières, les craintes, elle existe en tant que chanteuse noire et même meneuse de revue .

Sur scène seulement deux musiciens chanteurs maintiennent le rythme trépidant qui leur est imposé, un noir et sa batterie et un aveugle d’opérette au clavier. Attention aveugle d’opérette mais pas chanteur et musicien d’opérette, il assure.

Caroline Devisme nous raconte alors sa vie, avec cette volonté un peu folle, son parcours au milieu des paillettes. Elle dévore la vie à grandes enjambées, ponctuant son parcours de notes en notes au milieu de l’univers musical Motown, de la soul et de la musique pop.

C’est un théâtre burlesque, rempli d’humour et d’émotions, un théâtre surprenant, fort en soubresauts et rempli de nostalgie. Un théâtre basé sur la réalité, mais une réalité si incroyable qui nous fait sombrer dans le rêve à chaque instant.

Récit d’un parcours totalement atypique, d’une quête un peu folle, de la réalisation d’une jeune fille qui court après ses racines, son être et se retrouve enfin.

Caroline Devisme est exceptionnelle, un tonus, une pêche qui nous emporte accompagnée par deux lascars fabuleux. À eux trois c’est un grand orchestre avec ses chœurs… et on suit, on est tiré dans un récit qui semble impossible et pourtant !

C’est du très beau travail bravo à eux et à Thomas le Douarec qui signe une mise en scène remarquable. Une pièce à voir absolument, c’est gai, musical à souhait, prenant, que dire de plus : j’ai adoré !

Jean Michel Gautier

 

Le Jour où je suis devenue chanteuse black

Mise en scène : Thomas Le Douarec

Avec : Caroline Devismes, Mehdi Bourayou, Alex Anglio