PASCAL AMOYEL pour LE PIANISTE AUX 50 DOIGTS

 

 

 

Pascal Amoyel loupe

 

 

Pascal Amoyel, bonjour et bienvenu sur Regarts.org, pianiste virtuose, on ne vous présente plus. Vous êtes à nouveau sur scène avec votre dernier spectacle « Le Pianiste aux 50 doigts, l’incroyable destinée de Gyorgy Cziffra », quel en a été l’origine ?

Un jour, quand j’avais 11 ans, la gardienne de mon immeuble m’entendant jouer de derrière la porte m’apprit que le grand pianiste Georges Cziffra avait habité le même immeuble et qu’il venait de déménager pour ouvrir une fondation pour aider les jeunes musiciens. Elle ajouta : « c’est peut-être ton destin d’aller le rencontrer ! » ! Elle vit juste, car ce fut grâce à lui que je devins pianiste. Je rencontrais alors non seulement le pianiste de légende, mais un homme d’une grande bienveillance qui accueillit le pianiste en herbe que j’étais avec beaucoup de gentillesse et de positivité. 

 

Qui était György Cziffra ?

Il est l’un des plus grands pianiste de l’histoire, ainsi qu’un improvisateur extraordinaire. Il eut également la particularité d’avoir une vie incroyable.

 

Une vie « difficile » que vous racontez sur scène ?

Oui. Du petit pianiste de cinq ans jouant dans les cirques des bidonvilles de Budapest jusqu’au soldat évadé qui vola une locomotive à la Wehrmacht, de l’homme condamné aux travaux forcés en Hongrie au pianiste de cabaret jouant dans des piano-bar sordides, sa vie est un véritable roman, méconnue, que j’avais à cœur de faire découvrir au public.

 

Comment avez-vous choisi les morceaux que vous interprétez ?

Lorsqu’il jouait, sa vie et son œuvre était totalement liées. J’ai souhaité que le théâtre et la musique soit également imbriqués dans une forme inédite, avec également parfois des alternances musiques et textes. Je reste quand même un concertiste !

 

Auriez-vous pu lui rendre hommage avant de la même manière ?

Lorsqu’en 2010 on me demanda de lui rendre hommage à l’occasion de l’inauguration d’un auditorium au festival de la Chaise-Dieu – festival qu’il créa – je ne me voyais pas arriver en lisant une lettre. Je me suis pris au jeu d’un petit spectacle ; je ne me doutais pas alors que je continuerais à le donner près de 15 ans plus tard ! 

 

L’avez-vous redécouvert à travers votre préparation au spectacle ?

Oui, bien sûr, car je me suis non seulement souvenu de tout ce qu’il m’avait dit, mais aussi référé à ses écrits qui étaient plus précis.

 

Mélange de mots et de musique, que préférez-vous ?

Parfois, la musique est l’étincelle du mot, parfois elle en est le parfum. Je suis bien sûr avant tout musicien, mais la musique des mots est essentielle, et la musique raconte des histoires.

 

L’intimisme du Théâtre Montparnasse vous aide-t-il à le raconter et peut être à le retrouver ?

Intimisme oui et non, car il s’agit quand même d’une salle de 700 personnes ! Mais il est vrai qu’on se sent infiniment bien dans ce théâtre à l’italienne, où l’on a l’impression de parler à la fois à tous et à chacun. Je vis chaque soir une émotion nouvelle, comme si je donnais ce spectacle pour la première fois, c’est extraordinaire à vivre !
Nous musiciens, contrairement aux comédiens, n’avons pas l’expérience de jouer dans la même salle tous les soirs. Ici c’est un peu comme si je recevais les gens à la maison !

 

Selon vous quel est l’héritage musical de György Cziffra ?

Il ne parlait pas beaucoup en cours mais souvent un seul de ses regards m’apprenait plus que tous les mots. Je pense qu’il était si inconditionnellement musicien que, lorsqu’il posait ses mains sur les touches, se produisait immédiatement une sorte d’électricité foudroyante. Rétrospectivement, je pense que c’est ce message qu’il m’a apporté : lorsqu’on joue du piano, on fusionne avec l’instrument, on ne fait plus qu’un avec lui, on devient simple canal pour laisser s’exprimer tout le prisme des sentiments humains.

 

En vous remerciant, si vous pouviez, que diriez-vous à ce petit garçon qui apprend avec György Cziffra ?

Qu’il se rassure, car il ne le quittera jamais.

Jean-Davy Dias