Entête

LES ENFANTS DU DIABLE

 

Théâtre de l’Oriflamme
6 rue de l’Oriflamme
84000 – Avignon

17/18 avril 2024 puis au Festival OFF du 3 au 21 juillet à 11h30

 

Les Enfants du Diable loupe 

 

Une exploration poignante des héritages de la dictature

 

Les Enfants du Diable expose avec finesse et sensibilité trois destins, offrant un aperçu du calvaire enduré par ceux qui étaient qualifiés d'« irrécupérables ».  Cette pièce soulève des questions cruciales sur les répercussions dévastatrices de la maltraitance infligée aux enfants et sur les défis du déracinement, que ce soit par l'adoption ou par l'exil forcé.

Dès les premières images, les photos d’archives nous atteignent en pleine face ! Mais ce soir, nous sommes à Bucarest, une nuit de 2009,  transportés  deux décennies après la chute de la tyrannie des Ceaucescu. Veronica, déracinée et adoptée par un couple français à l’âge de 10 ans est devenue une chanteuse reconnue. Niki son frère est resté à Bucarest. Un frère et une sœur dont les chemins ont divergé depuis leur séparation, mais dont les destins se croisent à nouveau dans les méandres de leur passé commun. Les blessures douloureuses se rouvrent, dévoilant une vie marqué par la tragédie. Un tourbillon de mots et de cris, d’émotions qui entraînent la bête immonde dans son ballet d’horreurs. Et surtout, avec eux, le souvenir de leur sœur Mirela, une force unificatrice qui les rassemble… Son châle, délicatement posé sur le dossier d’un rocking-chair, qui se balance comme le font souvent les enfants autistes, est vide. Pourtant elle est bien et toujours là, cette petite sœur dont l’enterrement est aujourd’hui…

La temporalité de cette nuit devient métaphorique, symbolisant à la fois la brièveté et la cruauté du temps qui passe. Une seule nuit semble à la fois insuffisante pour réparer les blessures accumulées au fil des années et pour envisager un avenir différent. Pourtant, c'est dans cette nuit sombre et oppressante que leur passé douloureux pourra se libérer des chaînes qui les retiennent.

Véronica attend un enfant mais sa culpabilité est grande, elle essaie de se libérer, de les libérer,  alors peu à peu, elle entraîne son frère. Ils vont danser, boire de l’alcool, s’unir dans un rapport où l’amour va sortir vainqueur. Cette scène apporte une touche de respiration où l’on se surprend à sourire.

Les performances des deux comédiens, incarnent avec justesse et émotion les tourments et les espoirs de leurs personnages. Leur jeu rend l'histoire tangible, et l'émotion qui émane de la scène est palpable, touchant le public. Depuis les expressions de son visage jusque dans sa gestuelle, Clémence Baron apporte beaucoup de sensibilité à son personnage. Il est un fil tendu tissant une toile où la justesse des sentiments mais aussi leur violence trouvent crédibilité et force dans la sobriété de la mise en scène. Un texte intelligemment construit par le jeu sans excès et maîtrisé de deux comédiens Antoine Cafaro et Clémence Baron habités par leur personnage. Une mise en scène qui évite l’exposition spectaculaire de l’horreur pour aborder ce drame avec finesse et délicatesse où la création lumière est aussi à saluer car elle est pleine de précision et de lucidité. Aller voir ce spectacle c’est se prendre une bonne gifle d’émotion. Aucun pathos affiché de manière facile ne vient entacher la mise en scène. Et si la poitrine se gonfle et l’émotion surgit, la « faute » en incombe à ces deux beaux artistes

Fanny Inesta

 

Les Enfants du Diable

de Clémence Baron

avec Clémence Baron et Antoine Cafaro

Mise en scène Patrick Zard’