Entête

LA  PAIX  PERPETUELLE

 

Théâtre de l'Épée de Bois.
La Cartoucherie, route du champ-de-manoeuvre
75012 Paris

Jusqu’au 5 novembre 2023
les jeudis, vendredis et samedis à 19h.
Les samedis et dimanches à 14h30

La  Paix  perpetuelle loupe

 

 

Le jeune auteur espagnol Juan Antonio Mayorga est docteur en philosophie. Ses pièces ont  été montées, entre autres par Jorge Lavelli. La plus connue est Le garçon du dernier rang, qui a été portée à l'écran sous le titre Dans la maison.

Étrange pièce que La paix perpétuelle. Elle nous convie, dans un carré qui évoque un ring, à la sélection d'un chien anti-terroriste : lequel parmi les trois triomphera en obtenant le fameux "collier blanc" ?

Trois comédiens vont donc interpréter les chiens... pourquoi pas ?

Odin est un rottweiler, John-John un croisé entre plusieurs races et Emmanuel un berger allemand. C'est Emmanuel (la référence à Kant est flagrante) qui est le plus philosophe, celui qui se pose des questions, ayant été éduqué par une jeune maîtresse aveugle qui suivait des cours de philosophie.

Nous allons assister à tout : les rivalités, les accords (deux contre le troisième) la mise de laisse au bout des colliers, les "oraux" pour déterminer lequel est le plus susceptible de gagner.

Cassius (que joue le metteur en scène Hervé Petit) est un vieux labrador bousillé par sa carrière. C'est lui qui dirige le concours, tentant, à grand peine, de maintenir un subtil équilibre entre "la vigilance de la raison d'État et la préservation de la démocratie".

L'ambition est louable et on ne peut pas dire que ce thème ne soit pas d'une tragique actualité.

Après les épreuves, les trois finissent ex-aequo. Il faut donc repartir pour d'autres tests dont un seul sera la vainqueur. Nous ne révèlerons pas, bien sûr, son nom, pas plus que la fin, surprenante, de la pièce.

Là où le bât blesse, c'est qu'il faut entrer dans ce monde canin que tentent de faire exister des comédiens. Ils sont, les uns et les autres, très bons, chacun dans son rôle... mais on peine quelque peu à se passionner pour ce propos qui demeure malgré tout relativement "intello"; La philosophie n'est jamais loin : les scènes s'enchaînent, on suit, mais l'émotion curieusement, reste en carafe, malgré l'engagement des comédiens.

En outre, ces chiens (c'est voulu, mais bon !) sont curieusement humains : ils parlent, se posent de graves question existentielles, il y a même une tentation de voir un psy quand l'un, Odin, évoque la mort de sa maîtresse adorée.

Quand à cette "paix perpétuelle" qui donne son nom au titre, c'est une concept créé par  Kant (on y revient). Faisons court : pour lui, la guerre est naturelle et il souhaite transformer l'état de fait de la guerre en état de droit.

Au final, un spectacle en prise avec le réel, c'est sa force, mais qui n'est pas des plus faciles, vous voilà prévenus.

Gérard Noël

 

La  Paix  perpetuelle

de Juan Mayorga (trad. Yves Lebeau)
Mise en scène : Hervé Petit
Collaboration artistique : Ariane Elmerich
Scénographie et costumes : Caroline Mexme

Avec : Nicolas Thinot, Raphaël Mondon, David Decraene, Ariane Elmerich et Hervé Petit