JE REVIENS DE LA VÉRITÉ

Salle Roquille
3, rue Roquille
84000 Avignon
04 90 16 09 27

Jusqu’au 28 juillet à 13h00

 

Je reviens de la Vérité loupe 

C’est l’urgence du témoignage et sa rareté de plus en plus grande qui est en jeu. L’écriture même de Charlotte Delbo est un appel panique pour lutter contre l’oubli, mais pire encore, contre l’omerta car lutter pour conserver la mémoire de l’horreur des camps de concentration c’est lutter encore et toujours contre les nazis dont le but premier était de faire disparaître toutes traces et tous témoignages de leur génocide.

C’est ainsi que ce texte est avant tout un acte de résistance qui continue et poursuit l’entrée en résistance de Charlotte Delbo en 1941. Année où elle revint d’Amérique du Sud où elle accompagnait la tournée de Louis Jouvet pour revenir se lancer dans la clandestinité et se battre contre la peste brune qui gangrénait l’Europe.

En 1942, elle est arrêtée avec son mari. Lui est fusillé, quant à elle, elle va faire partie du seul convoi de résistantes envoyé à Auschwitz-Birkenau : 230 femmes, 230 combattantes. 181 d’entre elles n’en reviendront pas.

La quasi-totalité des témoignages qui font partie de Qui rapportera ces paroles ? (la pièce originale écrite par Charlotte Delbo) sont ici interprétés par trois comédiennes. Trois personnages naissent de ce montage, trois femmes qui agissent tour à tour en dialogues, en monologues ou en chœur. Au fil du temps de l’histoire qui passe. Au fil du verbe personnel qui disparaît au profit du verbe collectif, même si ce collectif s’amenuise de plus en plus.

La mise en scène d’Agnès Braunschweig (qui fait aussi partie de la distribution) circule autour d’un vaste rond immaculé au sol. Vêtues, coiffées, élégantes comme la mode de l’époque, c’est d’abord la lente et inhumaine dépersonnalisation que l’internement entraîne. Uniformisées, elles vont peu à peu et tour à tour égrainer le journal de la vie dans les camps de la mort. Journal intime des doutes, des effrois, des pertes, des espoirs. Journal intime des décès, des tentatives, des faims, des froids, des cruautés. Mais aussi journal intime des fraternités, des luttes, des rêves, des chaleurs humaines qui sont la seule réponse à l’abject. 

Les gestes, les déplacements, comme chorégraphiés créent, dans cette simplicité de décor qui évoque soit le cercle emprisonnant, soit la neige glaciale et mortelle du camp, créent des images, et l’on s’imprègne de cette vie, commune, qui transforme les individus en parcelles d’humanités indissociables.

Une parole contre l’oubli et une parole forte de femmes en lutte pour la liberté et pour la survie, voilà ce que porte ce spectacle qui, sous allure de douceur, tend un miroir redoutable à nos sociétés amnésiques : plus jamais ça. Faut-il répéter.

Bruno Fougniès

 

Je reviens de la Vérité

de Charlotte Delbo évocation en 18 fragments
à partir de la pièce Qui rapportera ces paroles ? 

Mise en scène et Scénographie Agnès Braunschweig 
Costumes, Coiffures, Maquillage Frédéric Morel
Travail sur le corps   Sylvain Chesnel
Création Lumières Michel Mourtérot
Régie Yann Marçay

Avec Agnès Braunschweig, Edith Manevy, Caroline Nolot

 

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Mis en ligne le 25 juillet 2017