L'ÉCHANGE

Villeneuve-en-scène

Colline des Mourgues

Du 03 au 20 juillet à 20h15

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Mis en ligne le 18 juillet 2014

Les éléments de la nature sont là : ciel limpide du début de soirée, rayons rasant du soleil qui nappent les hauts pins de la colline et deux caravanes à moitié mangées par la rouille, les cigales stridulent. Ensuite, avec la nuit, viendront des vols de martinets puis une demi-douzaine de pipistrelles frôlant les projecteurs qui attirent les moucherons.

C'est dans ce « déjà » spectacle que va se dérouler la pièce de Claudel.

Une femme sort de la caravane, grignote, s'ennuie, elle attend son homme qui remonte soudain et traverse l'esplanade, nu comme s'il venait de naître. Il y comme un goût d'innocence paradisiaque dans ce prélude. Une innocence qui va vite être la proie des pulsions et des pouvoirs de l'argent. Du concret. Du réalisme. Et de tous les désirs et des manques.

L'histoire ? Un couple fraîchement amoureux dans toute la pureté de l'amour naïf devient la proie d'un autre couple beaucoup moins innocent : la femme est comédienne, l'homme est un brasseur d'affaires, un roi du dollar, un adorateur du Dieu Argent.

L'enjeu : pour le milliardaire, la jeune femme, pour sa compagne, le jeune homme presque resté à l'état sauvage.

Leurs pouvoirs ? L'argent qui peut tout acheter même l'amour ? Le sexe et la folie sensuelle qui peut tout racheter.

Dans cette mise en scène au décor de campement de fortune et sous le chapiteau de la voûte céleste, le texte de Claudel semble s'adresser aux dieux qui laissent les humains s'arracher du ventre les uns des autres les désirs d'absolu. Mais ils ne peuvent les conserver. Car la pureté est comme l'eau qui roule, l'air qui souffle et embaume : elle ne s'attrape qu'en perdant sa vertu et sa liberté.

Dans cette quête où posséder détruit à coup sûr, les comédiens sont comme des jouets d'un destin qu'ils ne peuvent maîtriser.

La mise en scène de Jean-Christophe Blondel donne ce vertige qui fait passer le regard et l'esprit du minuscule et misérable au plus grand et absolu. Dans ce décor naturel idéal, les quatre comédiens sont beaux comme une humanité réduite à l'essentiel. Une humanité anthropophage, qui se nourrit des émotions des autres et de leurs vies.

Sensualité, force, maîtrise d'un texte élevé, ils sont tous les quatre intenses et d'une générosité rare.

Bruno Fougniès

 

L'Échange

Texte de Paul Claudel
Mise en scène Jean-Christophe Blondel

Avec : Valérie Blanchon, Pierre-Alain Chapuis, Pauline Huruguen, Yannik Landrein

 

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