ROBERT LE DIABLE – Cabaret Desnos

Théâtre de Poche Montparnasse
75, boulevard du Montparnasse 
75006 Paris
01 45 44 50 21

Jusqu’au 18 janvier 2016
Le lundi à 20 h 30

 

Robert le Diable – Cabaret Desnos loupePhoto © Matthieu Ponchel 

En ce soixante-dixième anniversaire de la mort du poète, il est un spectacle à voir absolument, celui concocté par Marion Bierry qui lui rend là un hommage d’une sensibilité et d’une simplicité remarquables.

Pas de portrait panégyrique mais une image qui se construit peu à peu, au fil des textes, celle d’un homme plus subtil que le rôle de poète pour enfants auquel on le cantonne souvent.

Certes on a tous appris à l’école « Une fourmi de dix-huit mètres », « Le pélican de Jonathan » ou « Les hiboux ».

Mais le talent de Desnos ne se borne pas à ces calembours, ces jeux de mots, ces vers de mirliton d’une apparente facilité aux chutes drôlissimes.

Au fil des poèmes retenus, se dessine un autre homme, sensible, impertinent, joyeux et chez qui la vitalité et l’engagement le disputent à l’humour et au sens du burlesque. Un homme épris de liberté, capable de s’engager au point que « Ce cœur qui haïssait la guerre » puisse se résoudre à combattre jusqu’à se retrouver dans des camps dont il ne reviendra pas.

Sur le plateau, peu de choses, rien qui puisse distraire notre attention : quelques palettes, des escabeaux et tabourets. Une mise en scène d’une grande fluidité où les quatre comédiens entrent, sortent, circulent comme en un ballet. Des comédiens aguerris qui savent parfaitement rendre la puissance et l’esprit des mots, faire sonner les syllabes avec une gourmandise évidente et un grand naturel. Et qui chantent aussi – plaisir de revoir Vincent Heden et sa voix superbe, puissante aussi bien dans les graves que dans les aigus-.

Des mots qui nous font sourire, rire, « Ils étaient quatre qui n’avaient plus de tête, Quatre à qui l’on avait coupé le cou, On les appelait les quatre sans cou. », qui nous émeuvent « C’est mon ami, c’est mon copain. Il a disparu un matin, Ils l’ont emmené, on ne sait plus rien. On ne l’a plus revu dans la rue Saint-Martin. » ou qui nous bouleversent comme le terrible « Chant du tabou » d’une violence inouïe et qu’Alexandre Bierry rend sans pathos ni exagération superflus, avec juste ce qu’il faut de colère contenue, « Le tabou est sur toi ! Adolphe Hitler ! Führer ! Chef ! Destin même d’un peuple qui a choisi d’être criminel et haï. — Le tabou est sur toi, le tabou est sur nous ! Ainsi chantent les soldats de l’agonisante Allemagne, gueules de brutes, cervelles de singes, cœurs de porcs de l’agonisante Allemagne. »

Oui, tout l’esprit Desnos est bien là, dans ce spectacle qui rit, qui rêve, qui apostrophe, qui mêle intelligemment gaité, mélancolie, colère. Et qui fait découvrir un grand poète auquel le destin n’a pas laissé le temps d’atteindre la renommée d’un Prévert.

« Il en est des poètes comme des dieux.
Certains semblent plus proches, plus familiers. Desnos se révéla ce dieu tendre, espiègle et attentif.
Petite fille, je devinais qu’il possédait le pouvoir de colorier nos misères, maintenant j’en suis sûre. »
Marion Bierry

Nicole Bourbon

 

Robert le diable, Cabaret Desnos

Hommage à Robert Desnos
Conçu et mis en scène par Marion Bierry

Avec Marion Bierry – Vincent Heden – Sandrine Molaro – Alexandre Bierry

 

Mis en ligne le 10 novembre 2015

Merci de cliquer sur J’aime