Livre de poésie, de philosophie, de religion, de sagesse, de spiritualité, voire de « développement personnel » comme on dit maintenant ? L’inclassable Prophète de Khalil Gibran est tout cela à la fois. Il délivre un enseignement universel et hors du temps sur l’amour, le travail, la joie et la liberté à travers un lyrisme chargé de paraboles qui rappelle immédiatement les écrits sacrés ou, sur un registre différent mais avec la même audace d’écriture, Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche.

Fort du succès qu’il rencontre auprès de ses très nombreux lecteurs, il n’est pas rare que le texte soit lu à haute voix ou qu’il soit « adapté » au théâtre (notamment ces dernières années par Elias Tabet, par Francescu Raffaelli et surtout par Francesco Agnello). La sobre version de Nordine Marouf qu’en propose aujourd’hui est particulièrement dépouillée et transparente. Seul en scène mais arrêté par des coups de cymbales et interpellé par des voix enregistrées qui le questionnent, il fait reposer tout le spectacle sur  son talent de comédien. Faisant presque toujours face à un public dont l’exiguïté de la salle lui permet d’être très proche, chaussé de sandales et vêtu d’une djellaba, le regard tendu vers l’horizon, la main droite levée et l’index dressé, il donne l’impression de prêcher d’une façon qui aurait pu être sentencieuse si ce n’était par une transcendance très intérieure qu’il se montre inspiré.

Frédéric Manzini

Le Prophète

D’après Khalil Gibran
Adaptation : Nordine Marouf

Avec Nordine Marouf