LE FAISEUR

Théâtre Jean Vilar
1 Place Jean Vilar
94400 Vitry-sur-Seine

Le 27 septembre à 16h00
puis tournée Dijon les 8 et 9 octobre
Istres le 14 octobre
Le Creusot le 16 octobre
Cergy-Pontoise du 4 au samedi 7 novembre
Suresnes le 12 et 13 novembre…

 

Le faiseur loupe 

On comprend pourquoi Robin Renucci et les Tréteaux de France ont eu le désir de monter cette pièce de Balzac écrite en 1840 : l’histoire qu’elle raconte est celle d’un as de la manipulation financière. Nous voilà plongés dans le monde des spéculateurs et autres vampires de la bourse.

Un monde où se rencontrent les capitalistes, les banquiers, les arnaqueurs, les initiés, les usuriers et même les petits épargnants fascinés par l’argent facile : c’est, en germe, le libéralisme économique qui est étalé là.

Bien sûr, les personnages paraissent un peu désuets, on rit de leurs naïvetés face à Mercadet (le rôle titre) et ses inventions, ses roublardises éloigner les créanciers et les transformer en investisseurs. Pourtant, les chocs boursiers que le monde a subis depuis quelques années nous a bien fait voir qu’à notre époque, tout le monde, et les plus grandes banques, et les plus avertis, et les plus diplômés des conseillers financiers peuvent se laisser aveugler par l’espoir d’un bénéfice mirobolant.

La pièce de Balzac nous montre un archétype magnifié du spéculateur, ruiné, toujours ruiné, mais vivant de toutes les promesses qu’il fait aux uns aux autres. Un spéculateur que rien n’arrête dans sa soif de vie à crédit. Il est même prêt à sacrifier sa fille pour ramener un beau parti dans sa famille. Prêt à ourdir des machinations pour faire croire que la bonne fortune revient dans sa maison. Prêt à user d’informations d’initiés et de menaces pour trafiquer des achats d’actions en bourse. Bref, un type moderne.

Pourtant, Robin Renucci n’a pas adapté ce texte de façon contemporaine. Toute sa mise en scène se déroule dans les années 1840. Un travail énorme a été fait pour créer des costumes d’époque, des perruques, des maquillages. Toute la scénographie nous renvoie à un appartement bourgeois parisien de ces années là.

C’est dans un autre choix de mise en scène qu’une touche de modernité apparaît : au centre du plateau, une scène est l’espace de jeu où se déroulent les actions. Tout autour, les comédiens attendent, confortablement installés dans un bric-à-brac de meubles, pour bondir sur le plateau et incarner leurs personnages. Un système qui donne à la fois une belle dynamique au spectacle et rend compte de tout le côté artificiel qu’expose sans cesse Mercadet aux différentes visites qu’il subit durant la pièce. Le faux-semblant règne.

Elles sont nombreuses, ces visites. Avec les dix comédiens dont certains interprètent plusieurs personnages. C’est un véritable défilé de têtes qu’a écrit Balzac. Et l’on rit aux différentes intrigues inventées par Mercadet pour se sortir des mains des créanciers et retourner les situations à son avantage.

L’âme humaine, sa mesquinerie, son avarice, son avidité, est dépeinte ici avec une noirceur totale. Même les domestiques n’échappent pas à ce constat. C’est aussi une manière de déclencher des rires libératoires.

La troupe des Tréteaux de France est experte dans les créations de ces pièces d’envergure. Tous ont le métier de comédien chevillé au corps et une belle envie de nous faire rire et rêver. Rares sont encore les structures à même de réunir sur un plateau autant de bons comédiens à la fois humbles et fiers. N’hésitez à aller voir ce spectacle, classique dans son ensemble, s’il passe près de chez vous.

Bruno Fougniès

 

Le faiseur

De Balzac
Dramaturgie : Évelyne Loew
Mise en scène de Robin Renucci
Scénographie et accessoires : Samuel Poncet
Costumes : Thierry Delettre
Lumières : Julie-Lola Lanteri-Cravet
Maquillage et Masques : Jean-Bernard Scotto
Assistants à la mise en scène : Joséphine Chaffin et Sylvain Méallet

Avec
Judith d'Aleazzo, Tariq Bettahar, Jeanne Brouaye, Bruno Cadillon, Daniel Carraz, Gérard Chabanier, Thomas Fitterer, Sylvain Méallet, Patrick Palmero et Stéphanie Ruaux.

 

Mis en ligne le 2 octobre 2015

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