L'ENTERREMENT (Festen... la suite)

Théâtre du Rond-Point
2 bis, avenue Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
01 44 95 98 21
Salle Renaud-Barrault
Du mardi au samedi à 21h00, dimanche à 15h00
Jusqu'au 10 novembre

Festen, le film avait stupéfait le public et fait découvrir son auteur Thomas Vinterberg.

Daniel Benoin l'avait ensuite adapté pour la scène et l'histoire veut que cette version ait donné envie à l'auteur danois d'écrire une suite théâtrale que le même Benoin s'est évidemment empressé de traduire et mettre en scène.

Le résultat se voit actuellement au théâtre du Rond-Point qui ne cesse de surprendre avec des programmations assez éclectiques.

On découvre là une œuvre forte, puissante, effroyable, dérangeante.

Tout contribue à donner une impression d'étouffement, du décor – un tapis sombre et chamarré recouvre tout, sol et murs, la seule clarté provenant de l'extérieur lorsque s'ouvre la porte sur la blancheur de la neige – au texte dense et au jeu intense des comédiens en passant par une mise en scène d'une grande sauvagerie. Car c'est peu de dire que Daniel Benoin ne ménage pas ses acteurs qui mouillent la chemise au propre comme au figuré.

Le spectateur en sort lessivé, secoué tant par le propos – comme dans Festen il parle de pédophilie – que par les images brutales et d'une grande violence.

La scénographie est superbe, une grande table de banquet occupant pratiquement tout le plateau, laissant un petit espace côté cour pour la chambre avec un lit surmonté d'un miroir.

Sur la nappe et la glace sont projetées des vidéos du père fantasmagorique auquel François Marthouret prête ses traits, et des extraits du film Festen.

Tout débute assez joyeusement avec une famille heureuse de se retrouver après tant d'années mais les fêlures apparaissent vite, les blessures sont toujours là, même enfouies, qui ne guériront jamais. Par petites allusions, l'auteur nous fait sentir ce qu'il y a d'inéluctable dans cette famille et amène progressivement le coup de théâtre qui va de nouveau tout faire basculer.

Les comédiens sont prodigieux, particulièrement Pierre Cassignard qui donne une profondeur accablante et émouvante au personnage de Christian et Caroline Proust qui campe avec une sensibilité à fleur de peau une superbe Pia dans un jeu qui va crescendo.

La tension monte jusqu'à la scène finale, intense et terrifiante, qui cloue littéralement le spectateur sur son siège.

C'est très noir, lourd, un peu trop parfois. Était-ce utile par exemple de donner une présence physique à l'enfant ? Il me semble pour ma part qu'il eût été préférable qu'il soit simplement évoqué.

De même, si les apparitions du père décédé sont bien vues et intelligemment amenées, celle où il conduit Sofie à la masturbation tient plus du grand guignol et n'apporte rien à l'action.

Mais à part ces quelques réserves, l'ensemble est intéressant et à voir car voilà un spectacle d'une grande force, qui interpelle, dont assurément on va parler, qui ne plaira pas à tout le monde mais n'est-ce pas le propre des grandes œuvres ?

 

Nicole Bourbon

 

 

L'enterrement (Festen... la suite)

Texte Thomas Vinterberg, Mogens Rukov
Texte français, mise en scène et lumière Daniel Benoin

Avec Pierre Cassignard, Paul Chariéras, Mélanie Doutey, Dominique Labourier, Samuel Le Bihan, Mathilda May, Caroline Proust et la collaboration de François Marthouret

Décor Daniel Benoin, Jean-Pierre Laporte
Vidéo Paulo Correia
Costumes Nathalie Bérard-Benoin

 

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