E-GÉNÉRATION

Théâtre de Belleville
94 rue du faubourg du Temple
75011 Paris
01 48 06 72 34

Jusqu’au 30 mars
le dimanche à 20h30 et le lundi à 21h15

 

E-Génération loupePhoto © Pierre-Henri Rosset

Douze comédiens présentent les habitudes de la génération Z, ces enfants des années 90 accros aux écrans. Google, Wikipédia, le GPS, Facebook, les sites de rencontre, le téléchargement illégal sont leur quotidien. Et ce quotidien est ici représenté grâce à une bonne vingtaine de saynètes jouées à plusieurs, en duo ou en solo. C’est très dynamique, dans une mise en scène à l’image du zapping. Les comédiens sont très investis pour convoquer sur scène toute une palette d’émotions.

De nombreux moments prêtent à rire : le groupe de parole des dépendants au téléphone portable, la société « Restons bons amis » qui permet d’engager une tierce personne pour organiser sa rupture, la scène de l’hôpital où, après un décès, chaque personnage feint la tristesse mais s’évade en textotant compulsivement, parlant de courses, de paris sportifs, d’argent, de sexe.

L’absurdité de certains passages est elle aussi savoureuse, avec une mention spéciale pour la personnification du GPS ou encore le discours révolté et survolté sur la pratique scandaleuse et ringarde du « slow » : comment ça un contact physique ? Mais c’est complètement dégoûtant !

Et, comme le nom de la Compagnie : « j’ai peur que ça raconte autre chose ». Derrière l’humour et l’autodérision, les problématiques sont bien plus profondes : on réfléchit sur le fait de n’exister que par le regard des autres et sur l’incroyable solitude de ceux qui ne font que des rencontres virtuelles, on s’interroge sur la religion – dans un passage un peu plus confus à mon avis.

Cependant, le message est clair : ne condamnons pas le mode de vie de cette e-génération qui ne fait qu’utiliser les outils créés par les générations précédentes. La génération Z est-elle trop sévèrement critiquée ? Je l’ignore et je m’interroge mais le monologue final semble abonder dans ce sens.

Ce qui ne fait aucun doute en revanche, c’est que les comédiens font preuve d’une énergie débordante, d’une belle complicité – sans doute parce que, même lorsqu’ils ne jouent pas, ils sont souvent sur scène, un peu comme dans un match d’impro. Et ils veulent se faire entendre. La salle, dans laquelle il ne restait aucune place de libre, était parfaitement disposée à les écouter. On pourra prolonger la réflexion en se plongeant dans la lecture de l’Écran Global de Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, afin d’apporter un complément théorique à la vision très juste offerte par Jean-Christophe Dollé dans son spectacle.

Ivanne Galant

 

E-Génération

Par la compagnie « J’ai peur que ça raconte autre chose »

Texte et mise en scène Jean-Christophe Dollé

Avec Clément Chauvin, Laurent Col-Minne, Déborah Dulniau, Eugénie Gendron, Nicolas Grand-Duc, Pierrick Jean Désiré, Laure Le Rouzic, Chloé Machin, Nicolas Neunlist, Maelle Quer-Riclet, Valentin Rosset, Elodie Zara

Création Lumière François Leneveu

 

Mis en ligne le 3 mars 2015

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