LES INSTANTS VOLÉS

Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris
Les 11,17,24 et 25 Juin à 20h00

 

Les Instants volés mis en scène par Jean Charles Mouveaux… Une œuvre dramatique et drôle, poético-réaliste d'une belle originalité d'écriture... Une plongée réussie dans l'univers cloisonné de l'asile psychiatrique !

Voici un ovni qui vous porte haut, hors des sentiers connus des pièces de théâtre musicales parisiennes voire françaises. Hier, nous avons eu le plaisir de découvrir le travail de toute une équipe talentueuse afin de faire vivre une œuvre sincère et formidablement bien adaptée pour la scène musicale.

Le livret est de Cyrille Garit qui n'a eu de cesse de porter ce projet à son terme depuis une lecture remarquée au Petit Théâtre Saint Martin où nous l'avions découvert quelques années auparavant. L'auteur dit lui-même s'être inspiré de faits qui l'ont touché de près. Il s'est aussi documenté sur les maladies mentales et est allé jusqu'à visiter une unité psychiatrique.

Ce travail de recherche précise ainsi aujourd'hui son écriture la rendant tour à tour réaliste et sur le fil d'une émotion subtile et jaillissante à travers les mots. Il trouve alors à l'orner de musique grâce aux compositions de Stève Perrin empruntant au style jazzy avec des mélodies savoureuses. Le tout est porté par des musiciens de talent – au clavier Jibril Caratini Sotto et à la contrebasse François Fuchs – illustrés par des textes sensibles et forts tels ceux sur l'univers ou la chanson, véritable lamento de Lula sur sa relation avec sa mère.

L'histoire est celle de deux jeunes patients malades, le jeune Max – intensément joué par Joseph Emmanuel Biscardi – bipolaire, tour à tour victime de ses crises dépressives ou délirantes, et de Lula, suicidaire à la dépression chronique – Vanessa Cailhol que l'on découvre ici pour la première fois dans un rôle dramatique et intime qui lui sied à merveille –.

Le discours amoureux entre les deux jeunes gens se noue malgré l'illogisme et la rigidité des échanges entre tous dans l'enceinte sans âme et confinée de l'asile… Citons l'infirmier psychiatrique Jean – interprété avec maestria par Philippe d'Avilla – également distribué dans d'autres rôles tel un patient délirant s'imaginant vivre une grossesse et qui accouche de l'univers, ou encore sa collègue Anna, – interprétée par Caroline Klaus, surprenante elle aussi dans une palette de jeux aux ruptures dramatiques délicates –.

La troupe est soudée à un projet de création sensible et beau, capable d'amener un nouveau souffle dans le milieu du théâtre musical. Elle capte et emporte son public ému jusqu'au ventre – chacun frise le nœud plus d'une fois –.Les acteurs par ailleurs sont pris, presque envoûtés par leurs propres rôles tout en restant bien conscients de leur jeu…

Voici une belle et prometteuse aventure et le Théâtre Michel a été bien inspiré de les recevoir pour leurs toutes premières représentations – le metteur en scène nous parle de présentation tellement la tâche encore semble ardue pour porter cette œuvre au sommet qu'elle mérite d'atteindre –. Souhaitons leur bonne fortune !

Il est rare en effet, de prendre une telle prise de risque dans ce contexte économique et culturel où face à un niveau de production de ce type de spectacle, rien n'existe comme support ou si peu encore alors que ce genre de création est un régal pour les autres pays d'Europe avec un vrai parfum théâtral issu de l'école de Stanislovski dont le théâtre contemporain s'inspire toujours aussi fortement .

Leurs prochaines dates de représentations ne sauraient tarder tant le talent et la potentialité sont bien là.

 

Safia Bouadan

 

 

Les Instants volés

Avec Vanessa Cailhol, Joseph-Emmanuel Biscardi, Caroline Klaus et Philippe d'Avilla

Piano: Jibril Caratini-Sotto - Contrebasse: François Fuchs
Mise en scène: Jean-Charles Mouveaux-Mayeur
Chorégraphies: Stéphanie Chatton
Assistante à la mise en scène: Marine Julien
Lumières: Pascal Noël
Son: Virgile Hilaire
Costumes: Michel Dussarrat