LE CABARET STUPÉFIANT

Hôtel de Lauzun
17 quai d'Anjou
75004 – Paris

Le 18 mars à 19h00

Puis au Hall de la chanson
211 Avenue Jean Jaurès
75019 Paris
01 53 72 43 00

Les vendredis 8 et 22 avril, lundis 11 et 18 avril 2016 à 20h30
Les samedis 9, 16 et 23 avril 2016 à 18h00
Les dimanches 10, 17 et 24 avril 2016 à 16h30

 

loupe Henri Matisse : Luxe, Calme et Volupté (inspiré de L’Invitation au voyage)

La vie réserve parfois des moments rares et inattendus.

Ce fut le cas ce vendredi soir où j’ai eu la double chance d’assister à une pure création et de visiter un joyau de l’île Saint-Louis, l’Hôtel de Lauzun, qui depuis 2013, abrite l’Institut d'études avancées de Paris, un institut de recherche qui accueille en résidence des chercheurs internationaux en sciences humaines et sociales.

 

L’hôtel de Lauzun

loupe L’Hôtel de Lauzun – Salon de musique

J’ai le privilège d’une visite guidée par celui qui connaît l’Hôtel à la perfection puisqu’il y habita 42 ans, son père en étant le gardien.

Raymond Boulharès vient d’ailleurs de lui consacrer un très beau livre, co-écrit avec l’historien de l’art Marc Soléranski (éditions Artelia).

Ce bâtiment du XVIIème siècle, où le duc de Lauzun donna moult soirées orgiaques, fut racheté au XIXème siècle par le collectionneur et bibliophile Jérôme Pichon, baron de noblesse d’Empire, qui lui redonna tout son lustre.

L’Hôtel regorge encore actuellement de dorures, fresques, mobiliers et tableaux magnifiques.

Baudelaire y habita et y écrivit L’Invitation au voyage.

Il faut dire que les voyages y furent nombreux car ce fut en ces murs que Théophile Gautier installa le fameux club des Haschischins (de Haschich bien entendu).

Ce club organisait des soirées dites Fantasia où sous l’influence du dawamesk ou confiture verte, composée de miel, de farine de pistache ou d'amande douce, d’une pâte huileuse (ou de beurre légèrement rance) et de résine de cannabis, l’imagination et les délires allaient bon train comme on peut le supposer.

Nous sommes dans le beau salon du premier étage, avec ses dorures, son plafond aux poutres décorées, son superbe parquet, sa cheminée sur laquelle scintillent les cristaux de deux immenses bougeoirs, et, encadrant les fenêtres d’où le regard plonge sur les eaux de la Seine, ses double-rideaux de la même damas rouge que celui qui recouvre les murs au-dessus de boiseries sombres.

C’est à une libre évocation d’une Fantasia que nous convie dans ce lieu hors du temps la Compagnie Zéphyr sous la houlette de Véronique Bellegarde qui assure la mise en scène autour de textes de Serge Gainsbourg, Alain Bashung, Nino Ferrer, Jacques Dutronc, Georgel, Charles Baudelaire, et aussi des poèmes de Allen Ginsberg et Lou Reed, tous parlant de drogues diverses, opium, haschich et autres canabis.

 

Le spectacle

loupe 

C’est toujours touchant d’assister à la naissance d’un spectacle avec toutes ces petites imperfections inévitables, problèmes techniques et autre trac immense des artistes, ce trac des premières si émouvant.

C’est par un extrait des Paradis artificiels de Baudelaire qu’Odja Llorca entame la soirée, extrait qui nous parle justement de la fameuse confiture verte.

Odja Llorca est une enfant de la balle. Fille d’Anne Alvaro et de Denis LLorca, l’une grande comédienne, l’autre comédien, metteur en scène et directeur de théâtre, elle révèle un talent qui lui est propre avec une gestuelle parfaite et surtout une voix au timbre ample, velouté et puissant dont elle joue avec maestria. Crinière de lionne et œil charbonneux, elle m’a irrésistiblement fait penser à l’écrivain Colette telle qu’on la voit sur certaines photographies.

Elle est accompagnée musicalement par Philippe Thibault, à la basse et au violoncelle, avec au sol une multitude de pédales d’effets et autres sampleurs dont l’usage s’avérait parfois un peu confus. Mais il est incontestablement un excellent musicien, et également compositeur et arrangeur.

Tout est fait pour nous évoquer les hallucinations qui devaient saisir les participants de l’époque, avec aussi la projection d’images qu’Olivier Garouste compose sous nos yeux en synchronisation parfaite avec les mots et la musique.

Dommage que la configuration des lieux oblige à utiliser un écran bien trop petit, placé de côté, qui empêche une intégration complète au spectacle.

Après cette mise en jambes, et avec l’assurance que donnera aux artistes cette première qui a visiblement conquis le public, ce Cabaret stupéfiant se jouera en avril au Hall de la Chanson à Paris Villette.

Le lieu sera moins magique mais permettra peut-être en fond de scène l’utilisation d’un grand écran qui deviendrait ainsi personnage à part entière de ce spectacle particulier d’une grande originalité.

Nicole Bourbon

 

Le Cabaret Stupéfiant

Mise en scène Véronique Bellegarde

Avec Odja Llorca (chant), Philippe Thibault (musique), OlivierGarouste (performance visuelle)

Lumière et son Philippe Sazerat

 

Mis en ligne le 19 mars 2016