GÉRARD GELAS

Le chêne noir
8 bis, rue Sainte-Catherine
84000 Avignon

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 Gérard Gelas

Rencontre avec Gérard Gelas, auteur, metteur en scène, directeur du théâtre Le chêne noir

 

Souriant, affable, Gérard Gelas nous reçoit dans les bureaux de son théâtre que de gros murs extérieurs protègent efficacement du soleil.

Et nous découvrons au fil de la conversation, un homme qui, s'il avoue ne pas trop aimer les étiquettes, accepte cependant celles de saltimbanque – c'est le titre du livre qu'André Baudin  lui a consacré – et d'homme de combat.

Car des combats il en a menés, et depuis ses tout débuts où ses pièces furent interdites, en 68, 70 et 71.

« C'était violent, se souvient-il encore. La police est venue me chercher chez mes parents et m'a emmené dans le panier à salade. Et ma pièce « La paillasse aux seins nus », n'a pu être jouée. Ne pas pouvoir s'exprimer, ça marque. On n'a pas idée aujourd'hui où la censure est moins directe, où c'est davantage la censure de l'argent. Oui, ce sont des moments difficiles mais qui en même temps m'ont forgé ; comme je suis têtu, je me suis accroché, je n'ai jamais désarmé. Ils m'ont finalement peut-être rendu service. Mais on ne m'a parlé que de ça pendant des années et ici à Avignon, dans ma ville, j'étais considéré comme le diable »

Cela lui a valu aussi de belles rencontres et de superbes souvenirs. C'est le ballet de Béjart dansé sur les corps à terre de sa troupe qui ne pouvait jouer, c'est Ariane Mnouchkine qui lui laisse la Cartoucherie pendant qu'elle part en tournée ainsi que ses bureaux pour qu'il puisse y dormir n'ayant pas d'argent pour se payer l'hôtel, c'est la rencontre tumultueuse avec Philippe Caubère  qu'il nous raconte avec cet accent méridional qui fait chanter les anecdotes : « On répétait Aurora, une pièce intimiste, presque silencieuse et on entend soudain dans la cour de la Cartoucherie une fanfare ! C'était Caubère et sa troupe venue de Marseille. Je sors furieux, le dialogue s'engage :

On est les Marseillais, on va prendre Paris

— Nous on l'a pris

— On sera chez Mnouchkine

— Moi, j'y suis déjà !

On a failli se battre puis on est devenu amis. »

Les années passent. Gérard Gelas est maintenant reconnu, mais il a toujours la fougue de sa jeunesse, n'a renoncé à aucune de ses convictions.

Avoir son propre théâtre lui permet une grande liberté, d'être hors tendance, d'encourager la création, en formant des jeunes gens, ou en montant des pièces de jeunes auteurs.

« À notre époque où on est chacun dans sa case, il m'est important de tendre la main à ceux qui nous suivent mais aussi à ceux qui nous ont précédés ».

Il aime travailler sur des sujets forts, que ce soit sur la guerre du golfe, sur Cantona, sur la vache folle ou en accueillant des spectacles comme Le lien ou La compagnie des spectres. Avec aussi bien de grands noms du théâtre que des inconnus.

À ce sujet, il ne comprend pas la polémique qui agite Avignon d'année en année sur la place des artistes célèbres dans le off.

« Il ne faut pas réduire quelqu'un à son nom. Ce qui compte c'est le spectacle qu'il défend. s'insurge-t-il. Le succès des uns n'a jamais créé l'insuccès des autres, il y a toujours des premiers et des derniers.  Il faut aussi savoir se poser des questions et se demander lorsqu'on est dernier pourquoi on l'est .Ce sont des procès de mauvaise intention. Et ne pas oublier que ceux qui ont du succès maintenant ont eux aussi galéré parfois pendant des années. »

Le Festival est bien parti mais il pense à la rentrée avec deux créations, « Le tartuffe nouveau », en alexandrins avec une problématique d'aujourd'hui et à l'occasion des municipales de 2014 « Épidémie » d'Octave Mirbeau avec la petite troupe du Chêne noir dont les membres ont de 11 à 15 ans.

Le Destin est parfois capricieux qui lui a concocté une vie sous le signe du Théâtre – peut-être parce qu'il est né l'année de la création du Festival d'Avignon – lui qui était au départ musicien de jazz et qui rêvait de cinéma. Qui sait ? Tout n'est peut-être pas encore écrit.

 

Nicole Bourbon

 

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