24 HEURES DE LA VIE D'UNE FEMME

Au Pitchoun Théâtre

 
@ Hugues Marcouyau

Malheureux au jeu, malheureux en amour… ?

 Une adaptation soignée et originale de la célèbre nouvelle de Stefan Sweig !

 À l’Essaion, lors de la reprise de la pièce pour la première le 28 septembre dernier, le public était bien là, attentif et pris par l’atmosphère feutrée régnant dans le théâtre avant le début du spectacle. Laure Meurisse arrive alors sur la scène, accompagnée par une femme de chambre qui lui tend une tasse de thé et s’assied à ses côtés. Elle l’assistera tout au long de la pièce, en témoin discret dans ses confessions... Signalons que ce rôle de domestique a été créé de toute pièce par Freddy Viau et on apprécie la présence dramatique et le talent de violoncelliste de Mona Lou, laquelle revisite avec une belle musicalité, le répertoire enveloppant de Bartok, Vivaldi et Bach.

La mise en scène imaginée à l’origine par Freddy Viau, vient du vœu de l’actrice rencontrée des années auparavant à l’école d’Alain Knapp, de monter cette œuvre touchante et vraie. Laure Meurisse nous conte ainsi les 24 heures de l’intimité d’une femme éprise de voyages et aimant les casinos… Dans une confidentialité très audacieuse, s’exposent tour à tour les affres de cette veuve, aristocrate d’une quarantaine d’années, dont la passion du jeu, l’amène un soir au Casino de Monte Carlo ou elle va basculer dans le destin chaotique d’un jeune flambeur dont elle tombe éperdument amoureuse.

 C’est une magnifique incarnation du personnage que nous offre la comédienne, petite nièce du regretté Paul Meurisse : on se laisse pénétrer par le tourbillon d’émotions qui gagne cette femme éperdue, prise dans l’engrenage de l’amour, laquelle se donne pour mission de sauver un jeune homme de la noyade et du démon du jeu. Son veuvage s’oublie très vite alors dans les plis de sa robe aux couleurs printanières- nommons ici les créations et le changement rapide de costume savamment imaginés par Rick Dijkman. La scénographie de Nicolas de Ferran, pensée en deux espaces distincts et liés à la fois, est intelligente et recherchée. Elle est avant-gardiste et classique, ce, afin de souligner les contrastes et de confronter les arguments dramatiques à l’action qui se déroule sous nos yeux : en effet, deux lieux de vie s’opposent tour à tour dans l’intimité de cet espace raffiné, très bien servi par les lumières de James Groguelin.

En un bel et généreux échange, le public se prend peu à peu au jeu contradictoire des sentiments et des émotions qui animent et agitent l’âme esseulée de cette femme. Et le charme opère jusqu’à la fin du spectacle .Très émus, nous recevons les dernières confidences de celle qui est presque devenue une amie que l’on souhaiterait consoler…Ce texte sublime de Stefan Sweig reste aujourd’hui d’une troublante modernité…

 

À l’affiche depuis le 28 septembre au Théâtre de L’Essaion

 

Safia Bouadan