L’ORIGINE DU MONDE

 

 

 

L'Origine du monde loupe 

 

Tout commence par une anecdote presque banale : l’achat dans une brocante d’une mauvaise reproduction du célèbre tableau de Courbet. Et pourtant, petit à petit, l’air de rien ou de pas grand-chose, d’élucubrations en calculs économiques précis et rigoureux, Nicolas Heredia se sert de ce prétexte inaugural – cette origine du monde, donc – pour se laisser conduire par son imagination et explorer tout l’insoupçonné potentiel dramatique de sa toile… et construire un spectacle dont on comprend qu’il se met lui-même en scène et en abyme.

Cette pièce de Nicolas Heredia n’est pas du théâtre classique, elle ne fait pas la part belle à l’épaisseur des personnages et ne nous plonge pas dans la densité des relations humaines. L’auteur et comédien étant seul en scène dans une sorte de one-man show qui tient parfois des sketchs de Raymond Devos ou de François Rollin, on trouve chez lui en revanche un vrai sens de l’écriture et du comique de situation en laissant une porte ouverte à l’imprévu. Le résultat fonctionne très bien et devient jouissif vers la fin du spectacle, au moment où naît une vraie tension entre le comédien et son public, qui en vient à s’interroger sur le propre rôle qu’il est en train de jouer.

Plus profonde qu’il n’y paraît au premier abord, la pièce est troublante dans sa façon de brouiller la frontière entre imaginaire et réalité et de remettre en question le statut de la représentation picturale comme cekui de la représentation théâtrale. Les codes bourgeois que la peinture bouscule ne sont plus aujourd’hui ceux de la représentation du sexe féminin en gros plan, mais bien ceux de notre rapport à l’argent, de la marchandisation de l’art, de la rationalité économique et du goût de l’aventure incarnée sur scène par le statut même du comédien.  Tout bien considéré, le comédien n’est-il pas lui-même un copiste et si oui, alors de quoi est-il copiste ?

Frédéric Manzini

 

L’Origine du monde

Conception, écriture, interprétation : Nicolas Heredia

Collaboration artistique : Marion Coutarel

Construction et régie : Gaël Rigaud