LES DEMOISELLES D’AVIGNON

THÉÂTRE La LUNA
1, rue Séverine
84000 Avignon
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Les demoiselles d’Avignon
En fait non, elles ne sont pas d’Avignon. Ces demoiselles là sont de Barcelone, du Carrer d’Avinyó (la rue d’Avignon), quartier de bouis-bouis et de bastringues. Ce sont les résidentes d’une maison close.

Nous sommes en 1900 et en ce début de siècle l’Espagne, l’Europe est en ébullition. Tout comme Pablo, qui n’est pas encore Picasso, mais juste un jeune peintre fougueux et déluré, différent des autres, persuadé que beaucoup de choses changeront. Avant-gardiste, il est prêt à bousculer le cours des choses et à suivre ses visions novatrices.

Un soir, il force les portes du lupanar. Il est fauché, mais grâce à son charme convaincant, il devient malgré tout le chouchou de la matrone, puis des filles, qu’il croque, au propre et au figuré, se retrouvant finalement accepté en marge de cette “famille” pas comme les autres.

La matrone mène à la baguette ses quatre pensionnaires et sa propre fille qui, elle, est affectée aux tâches ménagères. Le quotidien est pesant, parfois insoutenable. Chacune ici a derrière elle un passé lourd, triste, inavouable. Cependant, les filles conservent leur fraîcheur fragile, gracieuses comme des danseuses, jolies poupées articulées, elles chantent, pleurent, rient aux éclats.

La vie doit continuer, elles sont piégées dans l’engrenage. Deux d’entre-elles se lient d’une amitié sensuelle. La caractérielle Pilar déprime quand elle ne boit pas. La belle Rosita tombe amoureuse de Pablo, qui dit l’aimer en retour. Il lui propose même d’aller avec lui à Paris : un de ses tableaux vient d’être retenu pour la grande Exposition Universelle, c’est une chance, mais il n’a pas d’argent pour le voyage. Rosita n’osera pas l’accompagner, mais elle lui donne toutes ses économies pour qu’il puisse aller vivre son rêve. Alors il part en promettant de revenir la chercher dès qu’il deviendra riche. Il ne tiendra pas sa promesse, et ne lui rendra pas son argent non plus, mais il aura accompli son destin.

La maison close fermera définitivement après le drame du suicide de Pilar. Picasso sera longtemps hanté par ce bordel de la rue d’Avignon, et des années après, fruit de mois de travail et d’hésitations, il accouchera du chef d’œuvre précurseur du cubisme, au titre éponyme.

Nous réalisons à quel point le thème est hardi et ardu, mais il est traité avec sérieux et douceur par Marnie Duarte, sans vulgarité aucune, et l’esthétique est respectée même dans le tableau vivant du nu intégral de l’une de ces graciles demoiselles.

À la sortie de ce joli spectacle, nous avons presqu’envie de croire que, s’il n’avait pas fréquenté les filles de cette maison close, Pablo n’aurait peut-être pas eu la riche et folle destinée qu’à été la sienne.

Luana Kim

Les demoiselles d’Avignon

de Jaime Salom
Adaptation : Jacques Collard et Nicolas Laugero Lasserre
Mise en Scène : Marnie Duarte

Avec : Romain Lacroix, Marnie Duarte, Lison Boulain, Sophie Chasselat, Maïwen Doherty, Tanaïs Pilon, Léonie Jégoux et Nathalie Foucault

Lumières : Stéphane Baquet
Musique : Gaëtan Boufflet

 

Mis en ligne le 27 juillet 2015

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