VANIA

Bouffon Théâtre
28 Rue de Meaux
75019 – Paris
01 42 38 35 53

Jusqu'au 27 avril
Du jeudi au samedi à 21h00
Dimanche à 19h00

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Mis en ligne le 11 avril 2014

Vania

Une longue barre d'immeubles, grise et triste.

On franchit la grille, et on découvre en rez de chaussée un petit théâtre inattendu.

On entre. On s'installe sur les bancs recouverts de velours rouge.

Tout est déjà en place sur le plateau astucieusement aménagé qui nous donne à voir les différents lieux de la propriété, la pièce à vivre, centrale, le bureau du professeur Sérébriakov au fond, dans un recoin côté jardin le bureau de Ivan Petrovitch Voïnitzki, l'oncle Vania et côté cour ce qui sera l'atelier du docteur Astrov. Décors soignés où les détails abondent.

Les personnages sont déjà en place, et vaquent à leurs affaires.

Le noir se fait dans la salle. Les projecteurs s'allument.

Et là, le miracle.

Dès les premières répliques on sent qu'on va voir du grand, du très grand théâtre. On est immédiatement emporté, embarqué dans cet univers, on vit avec eux tous si présents, si bien interprétés qu'on en oublie que ce sont des comédiens, ils sont là, tous, les héros de Tchékov, tous ou presque car Philippe Nicaud, le metteur en scène, a eu l'excellente idée de resserrer l'action autour des cinq personnages principaux, adieu la mère, adieu la nourrice, adieu Téléguine, adieu le valet. Ils sont là, tous les cinq, aux prises avec leurs sentiments, le reste est anecdotique.

Et on vit avec eux, on souffre avec eux, on assiste impuissants à leurs naufrages.

Oui, j'ai partagé l'amertume et la colère d'Oncle Vania, la vacuité d'Elena, l'impuissance du professeur, les désillusions du docteur, j'ai souffert et pleuré avec Sonia. J'en ai même complètement oublié l'inconfort des sièges.

Et ce miracle, cette émotion, cette passion, je les ai éprouvés là dans ce petit théâtre qui ne paie pas de mine, avec ces comédiens inconnus des médias, et j'ai souffert comme jamais de voir une salle si peu remplie, et j'ai envie de crier partout « Mais allez-y, courez rue de Meaux, pour le prix d'une entrée de cinéma, vous assisterez à un moment exceptionnel que vous n'oublierez pas de sitôt, vous découvrirez ou redécouvrirez ce qu'est vraiment le théâtre, ce moment de partage incroyable qui peut vous emmener si loin, si haut, avec trois fois rien comme moyens mais avec juste ce qu'il faut de talent et de don de soi.

On n'était pas nombreux mais tous sous le choc, abasourdis.

À preuve le silence à la fin, ce moment de silence nécessaire quand on vient de vivre un grand moment avant de retomber sur terre pour faire enfin éclater les applaudissements.

Merci à vous tous, Bernard Starck, professeur d'une densité remarquable, Céline Spang qui sait si bien rendre toute l'ambigüité du personnage d'Eléna, Christèle Billault, tendre et émouvante Sonia, Fabrice Merlo, exceptionnel Vania, désespéré au-delà des mots et Philippe Nicaud, docteur séduisant en diable, maître d'œuvre de ce prodigieux spectacle qui touche ici à l'essence même du théâtre.

Nicole Bourbon

 

Vania

Auteur : Anton Tchekhov
Avec : Christèle Billault, Céline Spang, Fabrice Merlo, Philippe Nicaud, Bernard Starck
Mise en scène : Philippe Nicaud