UNE BOUTEILLE À LA MER

Le 100 ecs
100, rue de Charenton
75012 Paris
01 46 28 80 94

Les 11, 12 et 13 avril 2017 (voir horaires sur le site)

 

Une bouteille à la mer loupe 

Tiré d’un roman de Valérie Zenatti, Une bouteille à la mer met en scène la web-rencontre de Tal, une étudiante juive qui vit à Jérusalem et de Naïm, un jeune habitant de Gaza.

Moins d’une centaine de kilomètres sépare les deux villes et pourtant il est quasiment impossible à leurs habitants de se rencontrer. Alors Tal met en œuvre l’idée poétique de lancer un message à la mer, dans une bouteille, comme une naufragée fait franchir son appel au travers l’infranchissable. C’est son frère, militaire en poste autour de la bande de Gaza, qui se charge de l’y déposer. Et c’est Naïm qui un beau jour, la trouve enfoncée dans le sable de la plage. Sur la feuille glissée dans la bouteille, un court message d’amitié et une adresse mail.

Chacun de leur côté du mur, les deux jeunes gens subissent l’état de fait, cette guerre incessante entre Israël et la Palestine. Gaza comme une prison à ciel ouvert, pauvre, en constante tension. Jérusalem où les attentats suicides provoquent la peur et la méfiance au quotidien.

Ils sont pourtant nés sous le signe de l’espoir des accords de Washington entre Yitzhak Rabin, premier ministre israélien, de Yasser Arafat, président du comité exécutif de l'OLP. C’était le 13 septembre 1993. Un souvenir radieux qu’ils ont en commun car pour leurs deux familles cette rencontre a été vécue comme une fête et l’annonce d’un avenir meilleur.

C’est de cela dont il est question dans leur échange de mail : cet espoir de paix et cette guerre toujours présente.

Mais ce que l’adaptation de Camille Hazard met surtout en avant, c’est la relation naissante et l’immense envie de vivre, de rire, de rêver que Tal et Naïm expriment. Le ton de tout le spectacle est là, dans cette fraîcheur, cette évidence, cette réelle force de vie avec l’ironie et les rieuses provocations  inhérentes à la jeunesse.

Entre légères griffures de séduction et véritable naissance d’affection, ils sont tour à tour chargés des premières étincelles d’amour puis frères et sœurs forcément unis par la situation commune qu’ils subissent. Et l’on ressent très fort cette fraternité d’innocents partageant un sort qu’ils n’ont pas choisi. Une histoire commune dans des camps séparés mais surtout l’idée d’un dialogue possible en dehors des pouvoirs en place des deux côtés.

Eva Freitas, qui interprète Tal, apporte une vivifiante humeur et une joie doublée d’une vibrante sensibilité à son personnage, une fille plutôt bien dans ses baskets.  Aurélien Vacher crée un Naïm  bourré d’ironie, bien campée dans ses vingt ans, un mec attachant, pudique, blagueur. Tous les deux possèdent la diction rapide et sans apitoiement de la jeunesse actuelle, ce qui donne une rythme sans pathos au spectacle.

Et puis, à intervalles réguliers, comme les pages d’un chapitre que l’on tourne, la clarinette d’Elie Petit envahi l’air de ses nostalgies, ses douceurs, ses sanglots.

Un spectacle dont le propos mérite d’être entendu. Il porte le message d’une paix possible, malgré les rancunes, les conflits d’intérêts et les vengeances, l’espoir d’une génération capable de panser les plaies et de fonder, peut-être, les bases d’un apaisement unilatéral.

Bruno Fougniès

 

Une bouteille à la mer

D’après « Une bouteille dans la mer de Gaza » de Valérie Zenatti
Adaptation et mise en scène Camille Hazard
Musique Elie Petit (clarinette)

Avec
Eva Freitas, Aurélien Vacher

 

 

Mis en ligne le 22 mars 2017