ONCLE VANIA FAIT LES TROIS HUIT

Théâtre de Belleville
94 rue du Faubourg-du-Temple
75011 Paris.
01 48 06 72 34

Jusqu’au dimanche 31 mars 2019.
Du mercredi au samedi à 21h15,
le dimanche à 17h30,

 

Oncle Vania fait les trois huit loupe Photo © Pierre Dolzani

Il n’a y pas si souvent des pièces consacrées au monde du travail : on peut citer "L’Atelier" de Grumberg, des pièces de Michel Vinaver ou encore "L’Établi" d’après Robert Lenhart.

Ici, Jacques Hadjaje a la bonne idée d’évoquer la vie d’une usine située en Limousin. Il a combiné cette idée avec une autre : une troupe d’ouvriers amateurs de théâtre qui s’évertuent à monter "Oncle Vania " de Tchekhov.

On assiste donc à une chronique semaine après semaine et mois après mois, des répétitions, à commencer par les premières lectures "à l’Italienne". Intérêt de voir (si on ignore le travail de l’acteur) comment cela fonctionne : essais, tentatives, construction du personnages, éléments de mise en scène, pourquoi choisir tel mouvement ou tel autre... c’est passionnant. Il y a Esteban, un ouvrier blanchi sous le harnais, qui peine à apprendre son texte. Son épouse Colette, qu’il a entraînée là et qui, finalement, s’y trouve bien. La pièce a un certain côté intemporel, puisqu’on rencontre aussi un prêtre-ouvrier, prénommé Pierre. Il va jusqu’à citer Marx, à un moment, comme quoi...

L’ombre de "Lipp" ou le souvenir d’autres luttes syndicales plâne sur toute la pièce.

Un peu dejeté, un peu paumé, toujours à bricoler quelque chose, voici Jeff. Et Jeanne aussi et Camille et Clara la débutante. On les voit se révéler peu à peu, s’engueuler, se demander qui va fermer le local, s’émerveiller pour une robe, fêter un anniversaire. Par petites touches subtiles, l’auteur nous fait entrer dans leurs vies : on rit, on est ému, on se demande, bien sûr si les multiples difficultés vont leur permettre ou non, in fine, de jouer la pièce.

Dispositif simple : un rideau de plastique sépare le local de répétition du reste. Cela permet des entrées et sorties "signifiantes", des scènes qui isolent certains personnages tandis que les autres sont là, pas loin.

Hadjaje, auteur est ausi comédien et joue le rôle d’Esteban (en alternance). Il est humain et juste, tout comme Sébastien Desjours en prêtre sobre et convaincu. Et convaincant. Côté comédiennes, Anne Dolan épate, en tête de mule à la fois tonique, charmeuse et parfois crispante. Ariane Bassery joue Clara, nouvelle arrivée, dont le rôle, peu à peu, va devenir déterminant pour l’avenir de la pièce : elle va doper le reste de la troupe au milieu des difficultés, comme celles, majeures, de l’occupation de l’usine et son rachat. Isabelle Brochard émeut en Colette, avec sa fragilité et le poids des années de travail qu’on sent peser sur ses épaules. 

Ces comédiennes et comédiens se connaisssent et ont déjà travaillé sur d’autres spectacles, d’où, sans doute, l’impression d’unité et d’ensemble qui se dégage de la soirée.  Au final, une pièce positive. Une pièce qui fait du bien.  À voir.

Gérard Noël

 

Oncle Vania fait les trois huit

de Jacques Hadjaje. Mise en scène et scénographie : Anne Didon et Jacques Hadjaje

Avec : Ariane Bassery, Isabelle Brochard, Sébastien Desjours, Anne Dolan, Delphine Lequenne, Laurent Morteau et Jacques Hadjaje en alternance avec Pierre Hiessler

Lumières : Pierre Peyronnet
Costumes : Delphine Lebon
Diffusion : Emmanuel Dandrel
Adminsitration : Fabienne Marilleau

 

Mis en ligne le 15 mars 2019