MISTERIOSO –119

Théâtre de la Tempête
La Cartoucherie
Route du Champ-de-Manœuvre
75012 Paris
01 43 28 36 36

Jusqu'au 8 juin 2014
du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16h30

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Mis en ligne le 15 mai 2014

Misterioso – 119
Crédit photo : Pascal Sautelet

Koffi Kwahulé est né en Côte d'Ivoire en 1956. Son œuvre a déjà été beaucoup jouée et publiée. Une des constantes semble être une réflexion sur l'enfermement. C'est dire si cette pièce-ci est symptomatique puisque elle aborde le thème de la prison, une prison pour femmes où cinq détenues sans nom ni prénom se trouvent confrontées… à une animatrice théâtre. On voit rapidement, à quel point cette irruption de l'extérieur va poser problème. On nous apprend, d'ailleurs, qu'une autre intervenante est morte et que deux autres ont disparu. Découpé en scènes épurées, ce spectacle est fort : cela tient à l'écriture au scalpel de K. Kwahulé, grand amateur du jazz de Monk qui signe là une sorte d'oratorio baroque. Mais aussi à la mise en scène précise et inspirée de Laurence Renn Penel. À mesure que nous avançons dans cette histoire et qu'en larges monologues éclate la détresse des prisonnières, nous appréhendons mieux cet univers carcéral, ses magouilles, son désespoir. Cette incommunicabilité qui voisine avec un désir éperdu d'amour. Il y a la femme noire, l'autre qui a tué son amant, celle qui est dans le déni du meurtre de son fils…

 L'action se concentre sur deux femmes : la détenue au bonnet, celle qui ne veut pas jouer le jeu, la rebelle, toute désignée pour servir de bouc émissaire. Et l'animatrice, à la fois ferme et à l'écoute, qui va nouer une étrange relation avec cette prisonnière-là. Amour y rime avec mort, l'expression « On ne tue jamais que ce qu'on aime» revenant à plusieurs reprises. Et pour cause. Délié des corps, moments suspendus, tension souvent limite, le travail des comédiennes est superbe.

Les autres femmes existent par elles-mêmes, bien sûr, mais aussi comme un chœur antique, chuchotant, ressassant des histoires, dansant ou bien encore rampant, comme les personnages du « Freaks » de Tod Browning. Il faut souligner l'à-propos du décor, structure métallique qui fait voisiner le haut et le sous-sol, les coulisses et la scène où la parade qu'elles préparent va être répétée. Et la musique, bien sûr.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ce spectacle foisonnant et riche, qui vous prend dès le début et ne vous lâche plus jusqu'à la fin… logique. À voir, donc. Sans hésitation.

Gérard Noël

 

Misterioso – 119

Texte de Koffi Kwahulé (Editions Théâtrales)
Mise en scène Laurence Renn Penel
Scénographie Thierry Grand,
Lumières Pascal Sautelet,
Musique Frédéric Gastard,
Costumes Cidalia Da Costa,
Vidéo Olivier Roset,
Son Lucie Laricq,
Collaboration artistique danse Maïmouna Coulibaly,
Assistante scénographie Muriel Siri,
Assistante mise en scène Joëlle Varenne

Avec : Jana Bittnerova, Maïmouna Coulibaly, Gabrielle Jeru, Douce Mirabaud, Natacha Mircovich, Karelle Prugnaud