MACBETH |
Le Ranelagh
Macbeth est certainement la pièce la plus connue mais aussi la plus tragique de Shakespeare. Il faut du courage, de la foi et de la passion – et peut-être une dose d'inconscience – pour s'attaquer à une telle œuvre où se mêlent grandeur, complots, assassinats, ambition, folie et remords, fantastique et poésie. Philippe Penguy nous en propose, dans ce magnifique théâtre du Ranelagh dont les sombres boiseries conviennent parfaitement à l'univers tourmenté de l'auteur, une version à la fois épique et classique. La scénographie est superbe dans sa sobriété. Une immense toile posée au sol et agitée de mouvements tumultueux sur laquelle flotte la brume nous projette dès l'entrée en matière sur la lande fantasmagorique, domaine des sorcières. Accompagnée par deux musiciens, cette scène est parmi les plus réussies du spectacle. Une passerelle et quelques marches grises symbolisent ensuite le château, où la salle du banquet se bornera à une grande table sur laquelle sont posés des gobelets. C'est simple mais propice à entraîner l'imaginaire du spectateur. Tout est en place, le drame peut se nouer dans une suite rapide d'actions pleines de bruit et de fureur, dans un monde de ténèbres où les démons peuvent venir hanter les humains. Les scènes de bataille finales sont parfaitement réalisées, chorégraphiées au millimètre, soulignées du son lancinant des cornemuses. La traduction de Jean Michel Déprats rend toute sa force mais aussi sa fantaisie et sa poésie au texte de Shakespeare. C'est une prose qui demande des comédiens aguerris, capables de rendre audibles des tournures peu courantes, de délivrer toute la puissance des mots mais sans paraître désuet ni pompeux, de trouver la musique des intonations qui permettra d'atteindre le spectateur. Être acteur shakespearien n'est pas chose aisée et si dans cette distribution certains s'en sortent pas trop mal d'autres peinent encore à trouver l'équilibre nécessaire. Mais on n'était qu'au soir de la première, laissons-leur encore un peu de temps. L'ensemble est un peu trop long et gagnerait à être allégé, même si ce n'est jamais chose aisée de procéder à des coupes mais le public du XXIème siècle a un peu de mal à se concentrer pendant plus de deux heures sur un texte d'une poésie barbare où on se perd parfois et qui gomme du coup la modernité que le sujet pourrait trouver dans cette histoire où dominent les jeux du pouvoir et de l'ambition.
Nicole Bourbon
Macbeth de William Shakespeare
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