LES PAPAS ET LES MAMANS

Théâtre des déchargeurs
3 rue des déchargeurs
75001- Paris
Du14 février au 31 mars à 21h30, du mardi au samedi

On connaissait Diastème, auteur et metteur en scène par quelques pièces. Il a aussi écrit des romans, notamment celui-ci dont Hervé Arnaud s’est emparé pour l’adapter et le jouer.

Samuel Tudela souligne qu’il a lui-même insisté pour le mettre en scène, ce qu’il a finalement obtenu. Alors ? Que dire du travail de ces trois-là, l’auteur, le comédien et le metteur en scène ?

Comme souvent (et ce n’est pas une critique) il y a une sorte de balancement entre l’interprète et le texte. Tantôt celui-ci domine, tantôt c’est l’autre qui se venge, passe devant et le comédien, ce qui n’est pas plus mal, se contente de le servir. Ici, dans ces morceaux choisis où différents personnages (plus ou moins jeunes) évoquent qui leur père, qui leur mère, il y a, comme on dit, à boire et à manger : costume élégant, barbe de trois jours, le comédien a une présence indéniable. Il bouge bien, et la mise en scène utilise intelligemment le décor, ménageant des espaces différents et se mettant au service (éclairages, musique et sons compris) de ce qui est raconté. Principal handicap, qui saute aux yeux dès le début, l’utilisation presque permanente du passé composé. C’est un roman et l’action est finie, dépassée. Ce léger handicap se fait oublier peu à peu, car certains passages sont « en direct ». Et puis on est pris par les histoires. Celle du père un peu alcoolo et graillonnant qui accueille son fils et un copain à lui. Celle de l’enfant qui doit jouer au football et accumule les petits déjeuners jusqu’à s’écrouler. Celle aussi de la pauvre Vic, violée, dont le père se suicide, celle encore de ce jeune amoureux qui se fait des plans pour un week-end avec sa chérie : « Quand elle m’aura quitté, je me mets une balle ! » assure-t-il.

Ce qu'Hervé Arnaud réussit le mieux, c’est l’évocation, par petites touches, d’un personnage ou d’un autre. Quand il « force » cherchant à tout prix à nous convaincre, on peut se montrer plus réticent. Il suffit parfois qu’il s’asseye sur un fauteuil ou bien, en slip et chaussettes qu’il nous raconte une invraisemblable histoire de triolisme, pour qu’on marche. Mais le spectacle n’en est qu’à ses débuts et gageons que tout ceci va s’assouplir.

Bref, ce spectacle mérite le détour. Pour le jeu d’Hervé Arnaud, pour la performance assumée de nous intéresser une heure trente, seul en scène. Pour la puissance d’imagination de l’auteur, Diastème (qui évoque parfois un Philippe Djian à ses débuts) Pour cette interrogation qui peut venir à l’esprit du spectateur qui passe le porche et se retrouve rue des Déchargeurs : « Et mon père, et ma mère, qu’est-ce que je pourrais raconter d’eux ? »

 

Gérard Noël

 

 

Les papas et les mamans

de Diastème
Avec Hervé Arnaud
Mise en scène : Samuel Tudela