L'ÉCOLE DES FEMMES DE MOLIÈRE

Théâtre DOUZE
6, avenue Maurice Ravel
75012 PARIS
Location : 01 44 75 60 31 theatredouze@laligue.org
Du mardi 08 mars au 08 avril 2012 - du jeudi au samedi 20h30 et le dimanche 15h30. 

"La femme est en effet le potage de l'homme;
Et quand un homme voit d'autres hommes parfois
Qui veulent dans sa soupe tremper leurs doigts,
Il en montre aussitôt une colère extrême." (Alain le domestique)

 

Ah qu'il est bon de voir qu'avec des classiques, on peut s'avérer moderne et garder la saveur de l'intemporalité du récit.

Arnolphe, qui se fait aussi appelé pompeusement "Monsieur de La Souche" est un homme mûr qui aimerait jouir d'un parfait bonheur conjugal. Or il est omnubilé par la crainte d'être un jour trompé par une femme. Aussi, confesse-t-il à Chrysalde, son ami qui désapprouve ses dires, a-t-il construit le dessein de s'unir avec Agnès, sa jeune pupille dont il a préservé l'honnête ignorance en la tenant recluse du monde et de l'instruction auprès d'Alain et Georgette, ses deux benêts serviteurs. Hélas le paisible bonheur d'Arnolphe est de courte durée quand, au hasard d'une promenade, il tombe nez à nez avec Horace (le fils d'Oronte, un autre de ses amis, envoyé par son père remettre une missive à Arnolphe) qui lui annonce qu'il s'est épris d'amour en chemin avec une jeune femme répondant au doux nom d'Agnès qui lui a confié que celui qui la tenait renfermée était un certain Monsieur de La Souche. Ignorant que ce Monsieur et que son actuel compagnon de parole ne sont qu'un, il jure à Arnolphe qu'il fera tout pour sauver son Agnès des griffes de son odieux compétiteurs. Dès lors, pour satisfaires ses vanités, Arnolphe jouera désormais double jeu pour garder sa promise et se venger de son jeune concurrent.

C'est dans un décor simple et épuré comme s'il était tout droit sorti du regard innocent et ingénu d'un enfant qui ne s'attache qu'à l'essentiel que les metteurs en scène font très intelligemment et très justement évoluer leur Arnolphe et ses accolytes qui semblent tous s'être échappés d'un dessin animé. Les costumes à peine esquissés renforcent cette impression graphique déjà très fortement marquée. Le rôle d'Arnolphe est avant d'être un régal à jouer une performance d'acteur très éprouvante. En l'interprétant, Claude Gisbert a magistralement relevé ce défi. Délicieusement double et odieux mais terriblement attachant, il a su rendre le burlesque de son personnage palpable et redonner à la Farce toutes ses lettres de noblesses, tant son énergie porte la pièce. Pierre-Michel Dudan qui incarne Chrysalde nous gratifie de sa grande présence et prestance pour nous offrir le raisonneur de la pièce. La douce et innoncente Agnès nous apparait sous les traits lumineux de Rebecca Goldblat qui donne avec toute sa force et son extrême sensibilité toute le dimension lyrique de son personnage. Vincent Desprat, malgré ses airs juvéniles, fait virevolter magnifiquement son Horace, rendant un parfait hommage à toute la densité émotionnelle liée au tourbillon des sentiments que represente ce rôle d'un jeune amoureux insouciant et prêt à tout pour tout conquérir. Michel Baladi et Séverine Cojannot excellent dans leurs rôles de domestiques incapables et totalement idiots au service d'Arnolphe. Ils sont les indispensables compagnons qui démontrent la bêtise absolue du raisonnement de leur maître en matière de relation conjugale et chacune de leurs apparitions régalent le spectateur. Notons que Michel Baladi incarne à la fin Oronte, le père d'Horace et apporte magnifiquement le dénouement. Tout ce bel ensemble est non seulement porté par des musiques d'époque qui nous maintiennent délicieusement dans l'imagerie des intrigues de Versailles et sa magnificence sous Louis XlV mais aussi par un subtil jeu de lumière.

 

"Si n'être point cocu vous semble un si grand bien,

Ne vous point marier en est le vrai moyen." ... (Molière)

 

Or vous seriez le moins malin des être humains

Si vous n'alliez découvrir cette œuvre en chemin (modestement moi)

 

Bref, courez-y!!!!!

 

Jérôme BAILLET

 

L'École des Femmes

de Molière
Mise en scène : Claude Gisbert et Chantal Labouré
Comédiens : Claude Gisbert (Arnolphe), Pierre-Michel Dudan (Chrysalde), Vincent Desprat (Horace), Rebecca Goldblat (Agnès), Michel Baladi (Alain / Oronte) et Séverine Cojannot (Georgette).