LE VOL

Le Lucernaire
53 rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris
Tél : 01 45 44 57 34

Jusqu’au 8 août
du mardi au samedi à 21h00

 

Le vol raconte la mémoire d’une partie de l’histoire de l’Argentine. Le temps de la dictature de la junte militaire qui a décimé la population pour éradiquer toute opposition entre les années 1976 et 1983. Des exécutions sommaires, des emprisonnements arbitraires, des séances de torture et des centaines de disparitions…

C’est par le prisme d’une histoire d’amour de jeunesse que Sonia Némirovki tente de soulever les cendres de ce passé dramatique pour en faire surgir les ombres et les incompréhensions. Lui et elle se rencontrent dans cette Argentine militaire, ils ont à peine le temps de s’aimer qu’elle disparaît soudain. Elle disparaît, il n’y a pas d’autres termes. En fait, elle est enlevée de la vue des autres par la police, enfermée, interrogée sans doute, torturée peut-être, tuée certainement. C’est ce peut-être, cette incertitude qui le hantera toute sa vie, lui que les dangers du régime pousse à s’exiler comme tant d’autres Argentins à cette époque.

Il vit à Paris mais pense toujours à elle. Une cicatrice qui ne peut se refermer. Il ne la cherche pas parce qu’il ne sait où chercher, mais toute une partie de son être l’attend. Une attente éternelle, un doute éternel comme une torture sans fin.

Qu’est-elle devenue ? Cette question l’empêche de faire son deuil, impossible de le faire sans la certitude de la mort de l’aimé.

C’est avec une petite boîte à musique, ritournelle de la chanson « Sous le ciel de Paris » que la narratrice de ce spectacle commence. Une manière efficace et poétique de situer l’action dans l’espace. L’histoire racontée est celle de ce souvenir, de cette quête statique, si loin de l’Amérique du Sud, les persécutions de la mémoire que subit cet homme.

Le dispositif scénique consiste en un écran sur lequel est projeté l’exécution de dessins à l’encre de chine : des silhouettes, des corps aux membres étirés, des foules qui apparaissent et disparaissent soudain sous la plume du plasticien Pierre Constantin.

Devant cet écran, elle est présente, comme un fantôme, elle danse, s’exprime au travers lui.

De très beaux moments parsèment cette pièce, des interrogations troublantes comme ce moment où il s’étonne que les Argentins d’aujourd’hui puissent vivre dans l’insouciance et l’oubli de ces années noires… pourtant le spectacle se languit malgré toute l’implication des trois interprètes. Le lyrisme de ce texte très écrit, trop respecté par l’interprétation, éloigne la douleur du propos. Il suffirait que les acteurs mordent avec plus de violence et de réalité ces mots pour que l’on soit vraiment touché par cette histoire.

Bruno Fougniès

 

Le vol

Texte de Sonia Nemirovsky
Mise en scène de Bertrand Degrémont et Caroline Rochefort
Plasticien : Pierre Constantin

Avec : Grégory Barco, Suzanne Marrot et Sonia Nemirowsky

 

Mis en ligne le 10 juillet 2015

Merci de cliquer sur J’aime