LE JOURNAL INTIME DE BENJAMIN LORCA

Au Monfort
106 rue Brancion
75015 PARIS
01 56 08 33 88
Jusqu'au 26 mai, du mercredi au samedi à 19h. Le dimanche à 16h.

Le journal intime de Benjamin Lorca

 

Il s'agit au départ d'un roman d'Arnaud Cathrine. Et malheureusement, cela se sent : on ne dira jamais assez à quel point l'écriture proprement dramatique est loin de l'écriture romanesque. Au mieux, on peut obtenir ce que Célie Pauthe avait fait avec « Des arbres à abattre » une œuvre de Thomas Bernhardt. Au pire des spectacles ni faits ni à faire, comme on en a déjà vu un certain nombre.

La réalité de celui-ci se situerait entre ces deux extrêmes. Au départ un jeune écrivain, Benjamin Lorca, se donne la mort. Deux proches, son ex-compagne et son frère se remémorent. S'interrogent. Non d'ailleurs sur les causes réelles de sa mort, mais plutôt sur ce qu'il était vraiment, ce qu'il pensait de l'une ou de l'autre. Sur un mystérieux journal intime qu'il aurait laissé sur son ordi portable. Bref, souvent ces questions sur le frère ou l'amant deviennent des interrogations existentielles. Ces personnages graves, qui disent (plus qu'ils ne jouent) le texte de Cathrine intéressent (à plusieurs reprises) mais ne passionnent pas. Déjà, le décor (noir, gris et blanc) agrémenté de chaises, frôle le pléonasme. La présence de deux musiciens (qui jouent, parfois trop fort, du rock des années 80) étonne. Et puis on s'y fait. Le lit, omniprésent au milieu de la scène, a sans doute une justification forte pour le metteur en scène, mais elle n'est pas évidente. Peut-être le problème est-il là : un excès decérébralité, qui fait que l'on comprend certaines intentions, mais que l'on peine à être touché.

Benjamin Lorca s'était ici suicidé, comme le personnage principal de « Le feu follet », roman de Drieu La Rochelle, filmé par Louis Malle, avec Maurice Ronet. Cela nous vaut des plans de Ronet, où sont incorporées des images (en noir et blanc) de la comédienne principale. Moui. Et ensuite ?

Bien sûr, ce spectacle a enchanté un fameux hebdo télé de gauche. Ses lecteurs iront et en reviendront ravis. Les autres, s'ils s'y risquent, pourront apprécier la prose de Cathrine. Certaines de ses trouvailles : « dans combien de temps serons-nous capables de sourire ? » ou encore « Après nous avoir quittés, son corps nous quittera. » Certains s'éclateront à écouter les deux musiciens.

De ce spectacle de bric et de broc, surnagent quand même les éclairages, très réussis. Et l'image finale, que nous ne dévoilerons pas. On retiendra aussi la présence sobre de Arnaud Cathrine (également interprète de son propre texte) et celle tourmentée et inspirée de Nathalie Richard : elle est l'âme de cette pièce, figée dans sa douleur, à la fois fragile et forte.

 

Gérard NOEL

 

 

Le journal intime de Benjamin Lorca

Mise en scène : Ninon Brétécher.

Comédiens : Nathalie Richard, Arnaud Cathrine.

Musiciens : Vincent Artaud, David Grebil.

Cinématographie : Jean-Charles Fitoussi.
Création musicale : Vincent Artaud.
Collaboration artistique : Jean-Louis Benoît.
Création lumières : David Debrinay.
Création sonore : François Vatin.