LES LARMES AMÈRES DE PETRA VON KANT

Théâtre de l'Athénée - Louis Jouvet
7 Rue Boudreau.
75009 Paris
Réservation:01.47.42.77.93
Du 22 Mai au 9 Juin 2012
Mardi à 19h. Du mercredi au samedi 20h. Dimanche 16h

 

Photo Marie Coulonjou-Gentil

En 37 ans d'existence, l'auteur et metteur en scène Rainer Werner Fassbinder s'est affirmé comme l'un des représentants majeurs du nouveau cinéma allemand des années 60-70. C'est en 1971 qu'il écrit sa pièce "Les larmes amères de Petra von Kant", qui restera en mémoire pour son adaptation cinématographique de 1972. L'auteur nous dépeint la descente aux enfers d'une créatrice de mode en vogue, qui lassée et déçue par ses relations amoureuses avec les hommes, va contre toute attente s'éprendre d'une jeune femme aux allures de fruit défendu, certes ravissante, mais déjà très marquée par le destin. Petra va devenir le pygmalion de Karine pour tenter de tisser avec elle un lien osmotique, mais sous l'emprise d'une folle passion sensuelle, cette femme dominatrice et tyrannique, va basculer dans une dépendance destructrice.

C'est dans la continuité de son cycle sur le couple commencé avec Marivaux et Mayenburg, que Philippe Calvario, bien connu des amateurs de théâtre et d'opéras, s'est intéressé à cette tragédie moderne dotée d'une héroïne dans la lignée de Phédre. Il signe ici une mise en scène au diapason du caractère extrême de la pièce, en passant avec originalité du réalisme à l'abstraction, mêlant les codes du théâtre et du cinéma dans le respect de l'auteur, à ceux de la danse burlesque sur fond d'ambiance pop-trash.

Il fallait une actrice à la personnalité incandescente et à la beauté singulière pour donner vie à Petra, et c'est Maruschka Detmers qui lui prête son talent déjà consacré par une carrière internationale. Carole Massana, adoptée par le "Café de la gare", lui donne une réplique étonnante dans le rôle de Marlène son assistante et souffre-douleur. Odile Mallet, qu'on ne présente plus, Joséphine Fresson et Alix Riemer sont parfaites dans des rôles moins centraux. Hélas,un bémol, pour incarner la superbe et vénéneuse Karine, Philippe Calvaria a choisi Julie Harnois, une de ses comédiennes attitrées, charmante mais peu charismatique et dont le jeu manque ici de rythme et d'épaisseur et se révèle peu crédible dans un tel personnage.

L'action se passe dans une chambre-atelier de mode, d'une sensualité glacée très germanique, imaginée par la bien connue Audrey Vuong et c'est la célèbre costumière Aurore Popineau qui a créé les élégantes toilettes colorées qui mettent en valeur la silhouette gracile de Maruschka Detmers.

Ce spectacle dans l'ensemble d'une grande qualité, n'a pas pour sujet l'homosexualité féminine, comme on pourrait le percevoir au premier degré, mais traite de la quête folle de l'amour et du désir qui nous pousse à nous attacher à la personne qui nous est néfaste, piège universel dont nul n'est à l'abri au cours d'une vie.

À voir pour l'écriture de Fassbinder, la performance et la séduction de Maruschka Detmers, saluée par un tonnerre d'applaudissements bien mérités.

 

Tanya Drouginska

 

 

"Les larmes amères de Petra von Kant"

De Rainer Werner Fassbinder

Mise en scène Philippe Calvairo

Avec Maruschka Detmers. Carole Massana. Julie Harnois. Odile Mallet. Joséphine Fresson. Alix Riemer
Décor: Audrey Vuong.
Costumes Aurore Popineau.
Son: Eric Neveux