LA CANTATRICE CHAUVE

Comédie Saint-Michel
95 Bd Saint-Michel
75005 PARIS
01 55 42 92 97

Les jeudis, vendredis et samedis à 20h, dimanches à 15h15.

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Mis en ligne le 29 juillet 2013

La cantatrice chauve

Dans les années 50, un Roumain nommé Ionesco révolutionnait la scène en lançant à Paris le théâtre de l'absurde. Dans un registre plus tragique, Beckett lui emboîtait le pas. Le charme de cette « cantatrice chauve » c'est que le jeune Ionesco ne s'interdit rien : calembours, coq-à-l'âne, citations…

On raconte que Ionesco a été frappé par le côté saugrenu des manuels de langue française à l'usage des étudiants étrangers. De là naît l'idée de dynamiter le langage. Les pauvres personnages, réduits à rien, ne sont plus que des caricatures. Quant à l'intrigue, elle vole en éclats. On conçoit le scandale, à l'époque. Cela n'a pas empêché « La cantatrice » de défier le temps, puisqu'elle est représentée depuis, sans désemparer, dans son théâtre de création. Heureusement, des droits se libèrent, puisque la voici, reprise par de jeunes comédiens et présenté avec une vision autre que celle de Nicolas Bataille (le metteur en scène d'origine). C'est, disons-le, une petite merveille. Pour ceux qui ne connaissent pas Ionesco, c'est un choc, bien sûr, une surprise, face à ces deux couples presque interchangeables, les Martin et les Smith, tout aussi pontifiants et creux, cette « bonne » pin-up qui ondule devant eux et ce pompier féru d'anecdotes interminables.

La force de la pièce, c'est qu'on s'attache, presque malgré nous, à des détails, des ressemblances, de vagues pistes : or, il n'y a rien. Rien que le plaisir de jouer avec les mots « J'ai été au cinéma avec un homme, clame la bonne, et j'ai vu un film avec des femmes. » Le ressassement des détails (pommes de terre, train, incendies domestiques, liens de parenté…) ou encore la vacuité des phrases échangées. On glose ainsi, à l' infini, sur Bobby Watson, père de Bobby Watson et époux de… Bobby Watson.

Brio, donc, de la mise en scène, dans ce petit lieu, juste meublé de deux bancs. Efficacité maximum des comédiens, qui se sont fait des têtes à la Daumier, au service d'un jeu très physique et très déjanté. Qu'il s'agisse de Max Millet ou Céline Manchon, ils sont très bons. Axel Joseph se paie un franc succès en jouant de son charme. Quant à Marie Serruya, elle est drôle et touchante à la fois. A l'unisson de ses camarades. Un détour s'impose, du côté du cher Ionesco et de ses pantins dérisoires.

 

Gérard NOEL

 

La cantatrice chauve

d'Eugène Ionesco
Mise en scène : Caroline Raux.

Avec Céline Manchon, Laurent Duflos, Axel Joseph, Charlotte Lequesne, Florian Lemay, Anthony Péreira, Marie Serruya.