L'ÉCOLE DES FEMMES

Théâtre de la Tempête – Cartoucherie
Route du champ de manœuvre
75012 Paris
01 43 28 36 36

du 6 septembre au 2 octobre 2016
du lundi au vendredi de 11h30 à 13h et de 14h à 18h

Mis en ligne le 20 septembre 2013
Actualisé le 27 août 2016

L'école des femmes
Photo : Laura Mariani

Tout est admirable dans cette version de l’École des femmes.

La mise en scène, nerveuse, vivante et inspirée de Philippe Adrien souligne avec efficacité les caractères des personnages. On est saisi dès la scène d’entrée digne du grand guignol d’antan donnant d’emblée réalité à la réplique la plus connue de la pièce, le célèbre « Le petit chat est mort ».

Le décor magnifique et intelligent de Jean Haas, nous présente la demeure d’Arnolphe comme on n’a pas l’habitude de la voir : au premier plan, une allée de graviers précède une élégante terrasse de bois au bord d’un jardin où s’épanouissent d’énormes choux, lieu de travail des domestiques. En fond de scène, on devine derrière un rideau de tulle les lieux d’emprisonnement d’Agnès, à jardin s’élève la demeure et à cour la porte d’entrée que le vieux barbon n’aura de cesse de fermer à double tour.

Chacun se trouve ainsi déjà physiquement à sa place.

Ajoutez-y une bande son astucieuse et des lumières savamment travaillées : un sans faute côté technique.

Cette pièce pourrait être sordide : elle raconte en effet comment un homme élève une enfant depuis ses quatre ans, cloîtrée, loin du monde et de ses tentations, dans le but d’en faire à l’âge adulte son épouse soumise.

Il fallait bien tout le talent, hier de Molière et aujourd’hui du comédien Patrick Paroux pour rendre ce personnage odieux finalement plutôt pathétique voire touchant. Il faut dire que l’artiste ne ménage pas sa peine : diction d’une modernité assumée rendant malicieusement la musique de l’alexandrin, mimiques appuyées sans être ridicules, il exprime tout un panel de sentiments obsessionnels avec une aisance jubilatoire.

La jeune Valentine Galey campe une Agnès qui possède à la fois l’innocence et l’intransigeance de la jeunesse. Elle est d’un réalisme impressionnant dans la célèbre scène des Maximes, découvrant avec effroi ce que doit être une femme, un texte qui fait froid dans le dos, car il nous fait inévitablement penser à la condition féminine actuelle hélas encore en vigueur dans certains pays.

Pierre Lefebvre est un Horace beau, jeune, fougueux, élégant, comme il se doit.

Philippe Adrien a souhaité faire basculer résolument l’œuvre dans le registre de la farce, ce qui nous vaut des scènes d’un comique appuyé avec les domestiques, le notaire, l’oncle et le père d’Horace, qui apportent à mon avis un léger déséquilibre à l’ensemble, le trop étant comme souvent l’ennemi du bien.

C’est la seule réserve que j’émettrai, mais d’autres spectateurs à ce que j’ai entendu à la sortie ont a contrario énormément apprécié ce part pris.

Et c’est bien ce qui fait d’ailleurs tout le charme, l’intérêt, la richesse et la difficulté de tout spectacle, chacun le percevant à sa façon.

En tout cas, voilà de la belle ouvrage, qui devrait donner aux jeunes un éclairage inhabituel aux œuvres classiques en leur démontrant avec talent que classique n’est pas forcément synonyme d’ennuyeux.

Nicole Bourbon

 

L'école des femmes

de Molière
mise en scène Philippe Adrien 

Avec 
Raphaël Almosni - Enrique et notaire
Vladimir Ant  - Oronte
Gilles Comode - Alain
Pierre Diot - Chrysalde
Joanna Jianoux - Georgette
Valentine Galey - Agnès
Pierre Lefebvre - Horace
Patrick Paroux - Arnolphe

scénographie Jean Haas
lumières Pascal Sautelet assisté de Maëlle Payonne
musique et son Stéphanie Gibert
costumes Cidalia Da Costa
maquillages Sophie Niesseron
collaboration artistique Clément Poirée
direction technique Martine Belloc
habillage Emilie Lechevallier et Françoise Ody