EN ATTENDANT GODOT

L’Essaïon
6, rue Pierre-au-Lard 
75004 Paris
01 42 78 46 42 

Jusqu’au 4 juin 2016
du jeudi au samedi 21h30

 

En attendant Godot loupe 

Que dire d’une pièce qui commence par — Rien à faire. Et finit par — Allons-y. (ils ne bougent pas) ?

Tout a été dit et écrit sur cette œuvre de 1953 qui révolutionnait le théâtre et qui est devenue, au fil des décennies, une forme de classique. Soit, donc, deux personnages vagues, sortes de clochards coiffés de chapeaux melon. Ils sont au milieu de nulle part… et ils attendent. Qui ? Godot, bien sûr.  On a dit qu’il s’agissait là « des pensées de Pascal jouées par les Fratellini ». Pas faux, mais bien plus que ça évidemment.  

Après « Fin de partie », du même Beckett, J.C Sachot se confronte donc avec « En attendant Godot ». Son approche est vive et alerte, elle n’élude rien, joue le jeu. C’est bien le moins. Les deux personnages principaux, au-delà du costume, se singularisent assez vite : à Estragon, le côté humain, les préoccupations physiques comme manger ou dormir. Il est fatigué, il veut s’en aller, il propose qu’ils se pendent. Vladimir est le « meneur ». Lui, c’est le bon sens et l’esprit de décision. Au niveau de l’interprétation, Dominique Rattonat a une approche plus secondarisée, plus « clown blanc » et son personnage s’implique avec mesure. Au contraire de Philippe Catoire (Estragon) ou bien de Lucky, pauvre hère tenu au bout d’une corde. Hallucinante composition de Guillaume Van’t Hoff, qui jouait le rôle ce soir-là : il apporte une dimension inouïe et entraîne la pièce vers une dimension proprement fantastique. Pozzo est fort en gueule : c’est le maître. Celui qui affirme son importance, tout en se demandant comment se rasseoir dignement, une fois qu’il s’est levé. Beau travail de Jean-Jacques Nevest.

La nouveauté de « Godot » et sa force sont intactes : on rit, on s’émeut et on mesure à quel point en contournant la dramaturgie classique, en remettant en cause la notion même de langage ou de personnage, Beckett était un novateur, un authentique créateur, dont la pièce est à retrouver pour beaucoup et à découvrir pour d’autres. Surtout dans la mise en scène conçue par J.C Sachot. Une réussite, vraiment.

Gérard Noël

 

En attendant Godot

De Samuel Beckett.
Mise en scène et lumières : Jean-Claude Sachot.

Avec : Philippe Catoire, Dominique Ratonnat, Guillaume Van’t Hoff ou Vincent Violette et la voix de Thomas Sagols.

Costumes : Frédéric Morel.
Toile peinte : Aurélien Bédéneau.
Sculpture : Virginie Destiné.
Danses : Cathy Martin.
Marionnette : Nadine Delannoy.
Assistante mise en scène : Bérangère de Pommerol.

 

Mis en ligne le 20 mars 2016