VILLON LA VIE

Vu le 30/09/2013 à la SACD

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Villon
Photo Jean-François Noël

Remarquable ! Tel est le premier mot qui me vient à l'esprit au sortir de cet incroyable spectacle, véritable performance du comédien Michel Arbatz.

Imaginez des vers et des vers et des vers ! Pas loin de 1500 plus les ballades. Et de surcroit en moyen français ! Un véritable exploit déjà que de mémoriser cet énorme morceau.

Mais le plus sidérant n'est pas là.

On pourrait croire que la séance va être fastidieuse et qu'on aura du mal à fixer son attention. Que nenni !Ce diable de Michel Arbatz réussit à nous tenir en haleine tout au long du chemin, à nous faire sourire, à nous faire rire, à nous émouvoir, tant il met de vie et de sentiment dans ce long monologue qu'il entrecoupe astucieusement des ballades mises en musique pour la plupart avec son complice Olivier-Roman Garcia, accompagnées de guitares et bouzouki.

Et nous voyons revivre sous nos yeux ébahis une époque, avec ses ruelles mal famées, ses seigneurs tout puissants, sa justice inhumaine, ses riches et ses pauvres, grands de ce monde et femmes de petite vertu.

Et voici François Villon lui-même qui sort des manuels poussiéreux pour redevenir le jeune escollier qu'il fut, frondeur, espiègle, paillard, voleur, malicieux, farceur, volontiers querelleur, mauvais garçon et poète.

Et le texte pourtant difficile, emplis de double-sens, de sous-entendus, dans une langue inhabituelle, tantôt noir et subtil, tantôt franchement rigolard et paillard , ce texte nous devient soudain accessible, vivant, humoristique puis pathétique, tellement il est dit avec un naturel bluffant, des intonations, des nuances variées, des gestes qui en soulignent le sens.

C'est souvent très drôle car Villon est disons-le une vraie langue de vipère dénonçant d'une plume vive, alerte et sarcastique les injustices, traçant des portraits au vitriol, narrant des situations burlesques avec un humour tout rabelaisien.

Et puis le ton change pour devenir méditation poignante sur la vieillesse, la mort, l'amour impossible et qui pouvait mieux le faire que celui qui brûla sa vie dans des bouges aux côtés de bandits et de gueux, celui qui connut la prison et la torture et qui frôla souvent la mort, et qui disparut dans la fleur de l'âge.

C'est alors profondément émouvant car il ne nous épargne pas ses peines, ses chagrins, ses regrets.

« En l'an trentieme de mon âge
Que toutes mes hontes j'eus bues,
Ne du tout fol, ne du tout sage,
Non obstant maintes peines eues,
Lesquelles j'ai toutes reçues »….

… cy gist et dors en ce sollier,
qu'amour occist de son raillon,
ung pouvre petit escollier,
qui fut nommé françois villon.
oncques de terre n'eut sillon.

il donna tout, chascun le scet :
table, tretteaulx, pain, corbillon.
pour dieu, dictes-en ce verset.

Nicole Bourbon

 

 

Villon, la vie

Musiques, adaptation du moyen-français, montage : Michel Arbatz 
Arrangements musicaux : Olivier-Roman Garcia