À LA RECHERCHE DE JOSÉPHINE

 

Osez, osez Joséphine

Jérôme Savary est un formidable homme de spectacle,saltimbanque depuis l'époque du Grand Magic Circus. Avec « A la recherche de Joséphine », il donne-là peut-être le meilleur de ses spectacles.

Plus que l'histoire de Joséphine, c'est un hymne au jazz et au music-hall, sur fond d'évocation de l'épopée du peuple noir. Ce Savary-là nous embarque dans un tourbillon, qui nous raconte, avec en toile de fond l'histoire du jazz, de l'esclavagisme et de la ségrégation des noirs en Amérique, le négro spiritual, le blues, la salsa, le flamenco, le boogie en même temps que l'ascension de la petite Cindy, rescapée du cyclone Katrina, venue recréer à Paris le mythe de Joséphine Baker. Cela fait sans doute beaucoup de thèmes pour un même spectacle, sans oublier le message de fraternité que l'auteur veut faire passer et casse un peu l'unité du récit. Mais peu importe.

Pendant deux heures, c'est une frénésie de rythmes, de corps, de mélodies avec des musiciens ultra doués et des danseurs venus des quatre coins du monde. Dans un mélange des genres éblouissant, ces jeunes artistes jaillissent sur scène, dansant tantôt du hip-hop tantôt des claquettes, (remarquable !) au son d'un percussionniste vénézuélien étourdissant et d'un orchestre endiablé. On ne voit pas le temps passer ! On retrouve tout ce que qu'on aimait dans le Grand Magic Circus : la fougue, la virtuosité, l'impertinence, le politiquement incorrect, le talent, et toujours cette simplicité qui fait que le public adhère spontanément.

Nicole Rochelle s'impose avec toute son énergie malicieuse et sensuelle comme une « sacrée héritière » de Joséphine ; beau physique, jolie voix de soprano, drôle, expressive, jambes sublimes, corps souple qui se déhanche, yeux qui roulent, vive, espiègle, la jeune artiste américaine s'inspire de son modèle davantage qu'elle ne l'imite. Elle réussit avec brio le passage des figures imposées, comme la reprise de The Man I Love et le port de la miniceinture de bananes. Qu'elle reprenne "Ma Tonkinoise, C'est lui ou l'éternel J'ai deux amours," descendant le fameux escalier du Casino de Paris, elle donne au spectacle de Savary un coup de jeunesse et de fantaisie.

Autour d'elle une dizaine de danseuses et danseurs mettent la barre très haut évoquant la prestigieuse revue nègre. Les costumes sont magnifiques : robes pailletées, tailleurs façon Poiret des années 20, tout y est. Derrière eux, les images défilent, décor mouvant : images du cyclone, de Martin Luther King ou du Ku Klux Klan, elles composent des tableaux saisissants. Petite apparition de Jérôme Savary dans « J'ai deux amours » qui permet à la chanteuse de « roucouler » comme savait si bien le faire Joséphine, et prestation finale dans laquelle il raconte le plaisir qu'il a de retrouver cette salle, qu'il a bien connue du temps qu'elle s'appelait « Théâtre du Huitième » et où il a passé quelques années.

Plaisir amplement partagé.

 

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