PIERRE SALVADORI 

Rencontré lors de la 26ème édition du Festival du Film Britannique de Dinard, le réalisateur Pierre Salvadori est un homme simple, naturel qui « ne se la joue pas » malgré une filmographie brillante aux distributions prestigieuses. Le secret, sa vigilance rigoureuse à « rester dans la vraie vie ».

 

loupePierre Salvadori au centre , à gauche Jean Rochefort, à droite Noah Taylor
Photo Patricia Lacan-Martin

Quand on regarde la filmographie de Pierre Salvadori, on s’aperçoit que c’est un homme fidèle. Faire partie de son casting, c’est un atout sérieux pour y figurer lors du prochain ! Il n’est pas le seul réalisateur à pratiquer la carte « famille », le tout est de s’en trouver une ! Pour Pierre, la sienne fut d’abord les regrettés Guillaume Depardieu et Marie Trintignant qui jouèrent dans ses trois premiers films. « Nous étions très proches, je les aimais, ils étaient libres de ton, de paroles, sans filtre et aujourd’hui quand j’écris j’ai souvent leurs voix dans la tête ». Et puis d’autres grands noms du cinéma français ont rejoint l’univers singulier de ce cinéphile qui semble puiser son inspiration parmi les paumés et les cabossés de la vie. « Moi j’aime les gens pas sûrs d’eux, au moins ils s’appliquent », déclare Mathilde, alias Catherine Deneuve, dans son dernier film « Dans la Cour » récompensé par le Swann d’or du meilleur réalisateur au festival du film de Cabourg. Rencontre avec un cinéaste exigeant qui n’exclut pas de repartir un jour en Corse cultiver son potager.

J’ai toujours le goût pour les festivals internationaux car j’ai envie de comprendre ce qu’il se passe ailleurs. Et puis, les échanges d’idées avec les autres membres du jury permettent de se dévoiler. On s’aperçoit parfois qu’on n’a pas vu la même chose, c’est intéressant.

Pour moi, le cinéma anglais c’est le cinéma militant et politisé des années Thatcher. Une approche très sociologique et ironique que l’on peut mettre en parallèle avec le cinéma italien des années 60. Aujourd’hui, certains films s’inspirent de cette base mais je les sens moins sincères, un peu moins « dignes » que les films de Ken Loach ou Mike Leigh.

Je me méfie des sujets, je fais un cinéma de personnages et de mise en scène. J’aime parler du monde, de ce qui me bouleverse, de ce qui me préoccupe, à travers un mode discret.

Ce sont les dialogues, c’est à ce moment que commence pour moi la réalisation. J’ai été comédien et j’ai beaucoup écrit, à mes débuts, des scénarios de sitcoms, des sketchs et même des horoscopes ! Pour moi, cela a été très formateur et quand j’écris mes dialogues, je les joue, je les relis à haute voix des centaines de fois jusqu’à obtenir la fluidité et le rythme que je recherche. C’est mon moment d’exaltation et de volupté avant la réalisation et je les soigne. En revanche, les dialogues à la Audiard, ce n’est pas mon truc.

J’écris mais surtout je vis et nourris ma vie. J’essaie d’être un « Family Man » comme disent les Anglais. J’essaie surtout de rester en contact avec le quotidien, la vraie vie car dans ce milieu, quand la reconnaissance et le confort arrivent, on peut vite sortir du réel. Je le faisais par instinct, je le cultive aujourd’hui par rigueur.

 

Patricia Lacan-Martin

 

Pierre Savadori