ALEXIS MONCORGÉ

Rencontre avec un jeune comédien passionné, Alexis Moncorgé, nommé aux Molières pour sa remarquable interprétation dans Amok, adapté lui-même de la Nouvelle de Stefan Zweig. Gageons que ce coup de projecteur augure d’un brillant avenir à la mesure de cet artiste exigeant et cultivé.

 

Alexis Moncorgé loupe

 

Zweig ! Comment ne pas aimer Stefan Zweig ? Présent sur le devant de la scène depuis que les droits sont tombés dans le domaine public, l’écrivain autrichien inspire les gens de théâtre. Mais Amok restait une Nouvelle plus confidentielle. Ce n’est désormais plus le cas grâce à la volonté acharnée d’un jeune comédien passionné.

« Il y a tout dans cette merveilleuse histoire d’un jeune médecin qui fuit la Malaisie après cinq ans d’exercice ! Le secret, le désir, la passion, la folie, le dégout, l’ambiance, la fantasmagorie, s’enflamme Alexis Moncorgé qui confie que « ce n’est pas lui qui a choisi la Nouvelle, mais elle qui l’a choisi ».

Moncorgé, un nom qui symbolise le Cinéma Français à lui tout seul (que les curieux consultent Wikipédia) mais sur lequel on ne s’étendra pas car le jeune orgueilleux ne mange pas de ce pain là. Son parcours, qui force l’admiration, en témoigne. Grandi en Normandie au milieu des chevaux élevés par ses parents, le benjamin de la fratrie (il a deux sœurs ainées) a conscience depuis toujours de sa vocation. Mais, même si « aux âmes bien nées la valeur n’attend point le nombre des années », le jeune homme ne brûle pas les étapes. Et quand, après le bac, il formule son désir de devenir comédien à ses parents, sa mère, « très intelligemment » (dixit Alexis), lui propose de commencer par une licence de lettres modernes et de sciences politiques qu’il suivra en France et en Angleterre.

« Tout en m’encourageant dans ma vocation, ils souhaitaient ouvrir des horizons au provincial de 18 ans que j’étais».

Et ce n’est qu’en 2008 que le jeune diplômé « plonge dans le grand bain de la démerde » et s’installe à Paris en colocation avec un ami étudiant ingénieur. Inscrit au cours de Jean Laurent Cochet sur les conseils de sa tante, il le quittera au bout de cinq mois. « C’était pas mon truc ! ».

La rencontre cependant avec une élève, Caroline Darnay, le fait monter sur scène avec un Maupassant. Tout en gagnant sa vie avec des petits boulots de serveur, le jeune homme récidive l’année d’après et poursuit sa formation au Laboratoire de l’Acteur. Cette fois ci, il est au bon endroit et il y restera deux ans !

« Hélène Zidi me met en scène dans la Mouette de Tchékov et on le jouera à Avignon en 2012 et 2013 ».

Mais Alexis n’est toujours pas au bout de ses peines.

« Ca a été difficile mais, plutôt que se laisser abattre par le doute, il faut s’en faire un allié ». Tout en continuant à vivre d’expédients, il monte une Compagnie avec un ami comédien et décide de passer à l’action.

« Le métier a changé, l’acteur qui attend le boulot c’est fini ».

En cherchant un monologue, il tombe sur Amok et « c’est le coup de foudre . En quatre mois, j’ai fait l’adaptation, monté une équipe que je tiens à saluer, cassé mon PEL et trouvé une salle à Avignon ».

C’était l’été dernier, l’été de la salle comble !

« Un succès qui m’a permis de jouer cinq mois au théâtre de Poche à Paris cet hiver et de devenir enfin intermittent du spectacle pour la première fois à trente ans ».

Mis en scène par sa complice des débuts, Caroline Darnay, Amok, « son premier bébé » retourne cet été à Avignon au Théâtre du Roi René avec « le Bonheur des dames » de Zola, mis en scène par Florence Camouin et où il tient le premier rôle. Que des femmes autour de ce comédien à la tête bien faite et aux valeurs bien ancrées par une mère qui n’est jamais loin. « C’est ma première fan », avoue t’il tendrement.

Le 23 Mai, les professionnels du métier récompenseront leurs pairs et gageons que, du ciel, le grand-père sera fier de ce petit fils qui a profondément conscience que quand on porte ce nom, « on se doit d’être meilleur que les autres ». Respect !

Patricia Lacan-Martin

 

AMOK

Théâtre de Poche
75, boulevard du Montparnasse
75006  Paris
Tel : 01 45 44 50 21

Du mardi au samedi à 19h jusqu’au 22 Mai 2016

Et au Festival d’Avignon 2016
Au Théâtre du Roi René, en alternance avec « Au Bonheur des Dames »